L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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“Pour avoir une bonne image, il faut se connaître”

Jean Mino, directeur général de CFI

“Pour avoir une bonne image, il faut se connaître”

En marge du forum "Médias et Développement" qui s’est tenu à Ouagadougou du 11 au 13 septembre 2008, nous avons rencontré Jean Mino, directeur général de Canal France international (CFI). Avec lui, nous avons fait le tour, entre autres sujets abordés, de l’état et des perspectives de sa boîte, ainsi que de l’image de l’Afrique en Europe.

Pour le commun des mortels, dites-nous en quelques mots ce qu’est aujourd’hui CFI, surtout que la chaîne de télévision n’existe plus.

• CFI, après avoir été une chaîne de télévision, est maintenant une agence de coopération avec une mission principale qui est de travailler sur le terrain avec les professionnels de télévisions d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Europe centrale et orientale.

Nous faisons alors sur le terrain un travail de conseil et d’aide à la production, d’organisation de séminaires par le biais de transfert de compétences aux professionnels des télévisions partenaires. A cela s’ajoute une activité de banque de programmes, 5000 heures par an. Nous proposons des programmes africains et français aux télévisions partenaires dans le monde entier.

Pourquoi avoir laissé tomber CFI TV ?

• CFI se plaçait en tant que partenaire des télévisions nationales, notamment en Afrique. Il était difficile, à partir d’un certain moment, d’être à la fois partenaire et concurrent. C’est dire qu’avec son succès, CFI TV était devenue également concurrente des chaînes avec qui elle travaillait régulièrement. Cela a été un choix du gouvernement français à l’époque, puisqu’il fallait aussi faire une différence entre TV5 Monde et CFI TV. C’est ainsi que le choix s’est porté sur la coopération et l’action sur le terrain.

De quoi CFI tire ses revenus de nos jours ?

• CFI, aujourd’hui, tire essentiellement ses revenus d’une subvention du ministère des Affaires étrangères français.

Quel est l’objet de votre présence au forum Médias et Développement ?

• Il est normal que CFI, société européenne, participe à un forum où se rencontrent à la fois l’Union européenne dont la France est membre et l’Union africaine et les chaînes de télévisions africaines. En un mot, c’est aussi la concrétisation du travail que CFI effectue tous les jours sur place avec ses partenaires africains. Puisque la vocation de CFI, c’est de travailler avec les professionnels africains. Il est donc logique qu’elle soit là pour s’exprimer et rappeler le travail qui est le sien, surtout quand il s’agit de parler de questions importantes comme celles des médias et de la gouvernance.

Pensez-vous que ce forum puisse contribuer à faire voir une autre image de l’Afrique et des médias africains chez nos confrères du Nord ?

• Bien sûr, puisque la meilleure façon de changer cette image, c’est qu’il y ait un dialogue. Pour avoir une bonne image, il faut se connaître. Peut-être qu’aujourd’hui en Europe, on ne connaît très bien la télévision africaine qu’à partir des stéréotypes qui existent et sont difficiles à détruire. L’image changera petit à petit, lorsqu’il sera possible de reprendre les émissions produites en Afrique sur les chaînes européennes.

Mais pourquoi présenter une image de l’Afrique seulement quand ça ne va pas ?

• Je ne suis pas sûr que ce soit uniquement cela. En tant que journaliste, vous savez aussi bien que moi que les trains qui arrivent à l’heure n’intéressent personne. Si en Afrique on parle des guerres, des catastrophes, c’est parce que ce sont des évènements réels.

Parler de ce qui est bien est moins intéressant pour le journaliste qui les reprend. Moi, je crois beaucoup à la vertu du dialogue, c’est-à-dire que petit à petit on apprendra que l’Afrique est un continent qui bouge, qui se développe et que dans les pays africains il y a une croissance qui tourne autour de 7 à 8% l’an. Je pense que le discours sur les ressources énergétiques et minières de l’Afrique change déjà la perception que les gens ont du continent. Donc la richesse plus la croissance vont permettre à l’Afrique d’améliorer sa vie quotidienne et partant son image dans le monde.

Vous avez mené une étude sur l’audience de la RTB et il semble que cela a également porté sur d’autres médias burkinabè. Est-ce que vous pouvez nous donner quelques conclusions de cette étude ?

Cette étude a été faite pour nos partenaires, notamment la RTB et Canal3. J’aurais préféré que ce soit le directeur général de la RTB qui en parle. Mais je peux vous dire que l’étude a confirmé la bonne tenue de la chaîne publique, aimée et appréciée de ses téléspectateurs. Il en ressort cependant qu’elle devrait se préparer à la concurrence, en particulier à celle de Canal 3, qui est aussi une chaîne sérieuse. Le risque est aussi qu’avec la multiplication de chaînes de télévision, certaines ne respectent pas les règles du jeu. C’est-à-dire des chaînes pirates qui n’achètent pas de droits de diffusion. Je ne parle pas spécifiquement du Burkina, mais de la situation d’une manière générale. Pour me résumer, l’étude a révélé la force de la RTB et le sérieux de Canal3.

CFI emploie-t-elle du personnel africain ?

• Bien sûr qu’on y emploie des Africains, mais qui ont, certainement, la double nationalité. Et il est logique qu’une société de coopération comme CFI emploie des Africains ou des Français venant d’Afrique.

Par quoi se matérialise la coopération de CFI avec le Burkina ?

• Au-delà de l’amitié avec les responsables des télévisions burkinabè, cette coopération se concrétise, à la demande de celles-ci, par des sessions de formation. CFI leur envoie souvent des experts qui, pour la plupart, travaillent à France Télévision dont elle est une filiale. L’action de CFI consiste également en partie à mettre des programmes à la disposition des télévisions partenaires dans le monde, comme la RTB et Canal3 au Burkina. Ces chaînes peuvent donc reprendre nos productions dans leur grille pendant la durée des droits qui est de 10 mois pour chacune d’elles.

Mais, à l’inverse, est-ce qu’il y a des programmes du Burkina et d’Afrique qui sont mis à la disposition d’autres chaînes du Nord, d’Amérique et d’ailleurs ?

• CFI n’est pas une société commerciale. C’est-à-dire que les émissions françaises ou africaines sont proposées gratuitement aux télévisions d’Afrique. CFI ne peut donc pas vendre des programmes africains à des chaînes européennes. En revanche, elle peut aider, éventuellement, des télévisions africaines à pouvoir trouver des diffuseurs en France ou en Europe. Mais, il y a là un travail préalable à faire sur les émissions pour qu’elles puissent être acceptées en diffusion sur des chaînes françaises ou européennes.

CFI intervient dans ce cadre en travaillant ici avec des professionnels burkinabè, par exemple, pour améliorer la production de façon qu’elle puisse être reprise un jour par des télévisions européennes. Cela dit, CFI propose des programmes africains. Un programme burkinabè qui est, par exemple, présenté sur le réseau CFI dans l’ensemble de l’Afrique va se voir repris par le Sénégal, le Tchad ou la Centrafrique, etc.

Quelles sont les perspectives de développement de CFI ?

• Elles se situent toujours dans la relation de collaboration entre chaînes africaines et CFI. Aujourd’hui, le regard est tourné vers le numérique, ce nouveau moyen de communication, qui va révolutionner non seulement les habitudes de travail, mais aussi le regard des téléspectateurs. Il faudra donc travailler avec nos partenaires en tenant compte de cette évolution. Enfin, comme toujours en matière de journalisme et de médias, il faut une adaptation continuelle aux besoins formulés par les téléspectateurs.

Propos recueillis par

San Evariste Barro 

Hamidou Ouédraogo

L’Observateur Paalga du 16 septembre 2008



16/09/2008
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