L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Blaise Compaoré face à la presse : Confidences de deux animateurs

Blaise Compaoré  face à la presse

Confidences de deux animateurs

 

Suite à l'entretien accordé par le Président Blaise Compaoré à la presse nationale et internationale en direct de Kossyam le jeudi 6 septembre 2007, nous avons voulu rencontrer les trois animateurs afin qu'ils révèlent un peu ce que nous n'avons ni pu voir ni pu entendre. Il s'agit de leurs perceptions de cet entretien et surtout de quelques confidences.

Si Alpha Barry de RFI et Rémi Dandjinou de Canal 3 se sont prêtés volontiers à nos questions, il n'en a pas été de même pour Pascal Thiombiano, qui nous a posé un préalable : que nous demandions l'accord de son D.G. avant qu'il ne s'exécute. Certes, nous comprenons le souci qui anime notre confrère mais par principe, il ne nous appartient pas d'entreprendre une telle démarche. Voici donc ce que nous ont confié nos deux confrères. Par ailleurs, on lira une déclaration relative à cette interview, faite par la Convention des forces démocratiques du Burkina.

 

 

Alpha Barry de RFI

 

Jeudi dernier, tu étais l'un des trois interviewers du Président du Faso. Comment as-tu été coopté pour en faire partie ?

 

• C'est la Direction de la communication (D.C.) de la Présidence qui m'a contacté à cet effet. La D.C. m'a dit qu'il y aurait une interview de la Télévision nationale du Burkina (TNB) avec le chef de l'Etat et qu'elle souhaitait l'élargir à d'autres journalistes de la presse privée et de la presse internationale.

Ce n'est pas la première fois pour moi d'interviewer le Président du Faso, car je me souviens qu'en 1998, lors des élections, j'avais eu le privilège d'être parmi ceux qui ont été choisis pour interviewer le Président Blaise Compaoré.

 

Selon toi, qu'est-ce qui justifie l'absence de la presse écrite ?

 

• Je pense que la D.C.P.F. a voulu innover par rapport à l'entretien présidentiel de 2004. On se souvient qu'en 2004, il y avait jusqu'à six journalistes. Mais en 2007, il n'en a été choisi que trois pour seulement une heure de discussions. C'est certainement pour cela qu'ils ont opté pour  un journaliste de la presse privée (Canal 3), un autre des médias publics (Pascal Thiombiano) et moi-même pour la presse internationale.

 

Es-tu sorti satisfait de cet entretien ?

 

• Oui, je suis satisfait de l'entretien, et ce, pour plusieurs raisons :

- la première, c'est que j'estime qu'en dehors de deux ou trois thèmes non abordés, nous avons fait le tour des grandes questions de l'heure, en seulement 1 h 15 mn ;

- la seconde, c'est que j'estime qu'il y a eu des réponses directes ou implicites à certaines de nos questions.

L'objectif d'une interview n'est pas de coincer  l'interviewé mais aussi d'être à l'aise pour poser de bonnes questions.

Notre objectif, c'est d'avoir une information lorsque l'interviewé répond. Et partant de là, sur bien de questions, nous avons eu des informations, surtout sur la partie internationale de l'entretien. Sur la partie nationale, en effet, il y a eu des questions qui n'ont pas eu de réponse, mais le débat quand même a eu le mérite d'être mené. Quelque part, je trouve que ce fut un exercice intéressant.

 

Les questions adressées au P.F. étaient-elles préparées auparavant ?

 

• Non ! Nous avons eu une première séance de travail à la TNB  avec le réalisateur, la Direction de la TNB et le directeur de la Communication de la Présidence. Je dois préciser qu'il n'a pas été question de rédiger quelques questions et réponses pour les remettre au Président.

Nous avons rediscuté la formule. Lors d'un précédent entretien en 2004, chaque journaliste prenait un thème précis.

D'ailleurs, le directeur de la Communication de la Présidence, Seydou Ouédraogo, nous a explicitement dit

qu'il n'y avait pas de question tabou. Il a souhaité seulement avoir quelques indications sur les thèmes à aborder pour permettre au Président de se préparer.

Ensuite, nous nous sommes retrouvés tous les trois (Pascal, Rémi et moi) pour tout préparer en arrêtant les thèmes que nous lui avons envoyés.

 

Y a-t-il eu des thèmes-surprises ?

 

• Tout à fait!  Puisque nous étions libres de mener le débat à notre guise.

 

Certains ont estimé que Blaise Compaoré n'a pas été à la hauteur des attentes des téléspectateurs. Qu'en pensez-vous ?

 

• Le téléspectateur en est le seul juge. Le journaliste pose des questions et attend des réponses. Sur la partie internationale, Blaise Compaoré a beaucoup parlé. Par exemple, sur la Côte d'Ivoire, nous savons maintenant qu'il a demandé aux deux parties de lui écrire en ce qui concerne l'envoi des troupes militaires dans ce pays.

Sur la Guinée, il a reconnu qu'il y a problème et qu'il va bientôt nommer un envoyé spécial.

Sur le Niger, il a été assez prudent avec une réponse diplomatique, compte tenu certainement du fait de la position du Président Tandja concernant la rébellion touareg et surtout compte tenu des relations un peu difficiles entre les présidents  Compaoré et Tandja.

Sur Taylor, il a donné son point de vue sur le procès de  cet ex-président libérien .

Sur Taïwan, il a exprimé son sentiment et réaffirmé la position de notre pays.

Moi, personnellement je trouve que l'exercice était assez intéressant.

 

On a beaucoup épilogué sur la posture (jambes  croisées) de Rémi Dandjinou lors de cet entretien. Qu'en dis-tu ?

 

• Je n'ai pas fait attention à la posture de Rémi pendant l'interview. Mais, moi, je souhaite que l'on focalise le débat sur le contenu de l'interview et non  sur ses aspects formels. Quoi qu'on en dise, je ne pense pas que Rémi l'ait fait exprès pour défier le président. Certainement, il l'a fait sans s'en rendre compte.

 

 

Rémi Dandjinou

 

Dis-nous, comment tu as été coopté pour faire partie du trio d'interviewers du Président du Faso.

 

• C'est le Directeur de la Télévision nationale, Yacouba Traoré, qui m'a appelé une dizaine de jours avant l'entretien pour me demander si ça m'intéressait d'y participer. Je lui ai donné mon accord de principe. Mais il faut le dire,  la TNB m'a souvent demandé, par le biais du C.S.C., de participer à de telles émissions, ce, d'autant plus qu'avec elle, Canal 3 entretient de très bons rapports.

 

Comment as-tu trouvé l'ambiance qui a prévalu tout au long de cet entretien ?

 

• L'ambiance était studieuse parce que ce n'est pas toujours que nous avons l'opportunité d'avoir à mener ce genre d'entretien. L'atmosphère était assez détendue à la préparation de l'émission tant avec le directeur de la presse présidentielle qu'avec le directeur de la TNB et le réalisateur. Il n'y avait pas de pression et nous avons travaillé dans de bonnes conditions.

 

Estimes-tu que vous avez eu toute la latitude nécessaire pour  poser les questions voulues ?

 

• Je crois qu'il faut que les gens soient convaincus d'une chose: il n'y a pas eu de cadrage et de recadrage de la part de la presse présidentielle ou de la TNB. D'un commun accord, nous avons défini un canevas qui allait prendre en compte l'actualité nationale et internationale; et pour éviter de tomber dans un débat trop large, on a essayé de recentrer les choses sur la rentrée.

On a juste communiqué les grands thèmes sur lesquels on devait travailler. Il n'y a pas eu de choix délibéré de questions ou de limitation des questions. Mais il y a un élément qui reste un paramètre important : c'est le temps imparti à cette émission. En seulement une heure, on ne pouvait pas faire de grandes relances ou poser beaucoup de questions.

 

Certains téléspectateurs ont trouvé ta posture  (jambes croisées) lors de cet entretien assez irrévérencieuse. En as-tu eu conscience ?

 

• Je ne souhaiterais  pas  m'étendre sur cette question.  Je pense qu'il n'y a pas lieu de faire une polémique sur ce qui n'en vaut vraiment pas la peine.

 

Et pourtant, beaucoup de téléspectateurs t'attendaient pour une sorte de "mémoire en défense".

 

• Non, vraiment, je ne voudrais pas m'étaler sur cette question.

 

As-tu eu l'impression que Blaise Compaoré a été convaincant ?

 

• En tant que journaliste, j'estime qu'il a répondu à mes questions. Mais je ne peux pas être à la fois juge et partie.

 

A-t-il été à la hauteur de tes attentes en tant que journaliste ?

 

• J'aurais aimé que ses réponses soient un peu plus profondes, touchent un peu plus la réalité. Mais il faut reconnaître plusieurs choses : d'abord, c'est une émission en direct. Ça faisait quatre ans que le chef de l'Etat ne s'était pas prêté à un tel exercice au Burkina.

Je peux rester sur ma fin en termes de réponses, mais il faut reconnaître que c'est un exercice qui a eu le mérite d'avoir été fait. Comme  enseignement à en tirer,  le chef de l'Etat doit de plus en plus se prêter à ce questionnement-là. Il y a un besoin de communication exprimé par les populations (par exemple une grosse polémique a été faite sur ma posture, mon pied croisé...),  les gens ont souvent envie d'entendre le chef parler. Je crois que c'est un exercice qui a eu le mérite d'exister. De la profondeur des réponses du chef de l'Etat, on peut ne pas être satisfait. En ce qui me concerne, il y a eu des questions qui m'ont laissé sur ma faim pendant que d'autres réponses m'ont pleinement satisfait. Lorsque le chef d'Etat s'est prononcé sur le discours de Sarkozy, je crois que sa réponse a été d'une grande pertinence. Egalement sur la question siera-léonaise, sa réponse a été   intéressante.

Peut-être que si je n'avais pas été à l'entretien, j'aurais été plus critique.  Mais reconnaissons que nous,  journalistes ayant participé à cet entretien, avons manqué de répondant à un moment donné.  Sur certains aspects, on aurait pu être plus mordant, plus percutant.

 

Est-ce pour cela que certains ont jugé votre attitude d'ensemble timorée par rapport aux relances à faire ?

 

• Je ne dirais pas "timorée". On ne peut pas nous qualifier de timorés. Qu'Alpha Barry ait posé la question sur le Liberia, et Pascal et moi ayons parlé de la guéguerre François Compaoré≠Salif Diallo,  que moi, j'aie insiste sur certains positionnements ethniques des ministres, c'est être timoré ça ? 

Certes, sur certaines questions nous n'avons pas pu rebondir, car il y avait un problème de temps, mais on ne pouvait pas non plus, tout le temps, interrompre le Président du Faso  lorsqu'il parlait.

 

Entretien réalisé par

Boureima Diallo

L’Observateur Paalga du 12 septembre 2007



11/09/2007
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