L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Flambée des prix, constat à Ouaga

COMMERÇANTS DE Ouagadougou

 

Les prix des produits de première nécessité ont-ils été effectivement revus à la baisse, suite à la décision du gouvernement de renoncer, pendant 3 mois, aux droits de douane ou à la TVA sur certains produits de grande consommation? A la recherche d'une réponse à cette question, nous avons, dans la journée d'hier 11 mars, fait la ronde de quelques commerces de Ouagadougou. Le constat est que les prix "suggérés" par le gouvernement ne sont appliqués que par quelques gros commerçants des supermarchés. La plupart des boutiquiers de quartier disent ne pas pouvoir baisser les prix car ayant acquis leurs stocks avant la mesure du gouvernement. C'est aussi le cas de certains grossistes qui affirment ouvertement avoir stocké leurs marchandises, attendant que les prix montent de nouveau, au bout de l'échéance des 3 mois.

 

Les nouveaux prix suggérés par le gouvernement ne sont que timidement appliqués par les commerçants de Ouagadougou. La plupart de ceux d'entre eux que nous avons rencontrés hier matin disent ne pas pouvoir vendre moins cher ce qu'ils ont acheté cher. La mesure du gouvernement relative à la suspension des droits de douane et de la TVA sur certaines denrées ne peut donc pas avoir l'effet escompté sur le panier de la ménagère dans un bref délai.

Toutefois, dans le supermarché "Marina Market" de Gounghin, nous avons fait le constat d'une baisse effective des prix de certaines denrées, conformément aux prescriptions du gouvernement. A l'intérieur de la boutique, nous avons trouvé deux jeunes occupés à changer les étiquettes de certaines marchandises. Nawras Restom et Armand Yaméogo, qui nous ont reçus, ont livré quelques indications sur les variations de prix intervenues depuis le lundi 10 mars. Pour ce qui est du lait, le prix de la boîte de 2,5 kg de France lait est passé de 15 575 à 10 020 F CFA; et celle de 400g porte désormais l'étiquette de 1 695 F CFA en lieu et place de celle de 1775 F CFA. Il y a eu changement également en ce qui concerne "France lait" pour nourrissons. Car la boîte de 400g pour les n°1, n°2 et N°3 est passé de 2 500 à 1875 F CFA.

Le prix du sucre a légèrement baissé. Le prix du paquet de sucre importé (Saint-Louis), de même que celui de la SN SOSUCO a chuté de 775 à 600 F CFA. Le kilogramme de sucre en poudre conditionné coûte 425 au lieu de 650 F CFA.

Toujours à Marina Market, le prix du riz importé n'a pas connu de changement. Car, selon le responsable des employés, Armand Yaméogo, ce produit n'avait même pas connu d'augmentation de prix. Idem pour le sel dont le prix de la boîte de 500g est stabilisé, depuis plusieurs mois, à 750 F. Le directeur général de Marina Market, Georges Restom, que nous avons joint au téléphone a indiqué que ces variations de prix concernaient tous les supermarchés "Marina Market" à Ouaga et à Bobo Dioulasso. Et ces changements, a-t-il poursuivi, font suite à la concertation tenue samedi dernier entre le gouvernement et les commerçants et importateurs à laquelle il avait pris part.

Mais à Marina Market, comme dans la quasi-totalité des boutiques où nous sommes passés, certains produits dont les prix devraient connaître une baisse à la suite de la décision du gouvernement sont rares ou n'existent même pas sur le marché. il s'agit notamment du savon SN Citec (qui a disparu du marché), de l'huile Savor et des pâtes alimentaires de production nationale (qui se raréfient).

Idrissa Soudré est demi-grossiste de marchandises diverses près du grand marché de Ouagadougou. Chez lui, comme chez beaucoup d'autres commerçants de la capitale, les nouvelles mesures du gouvernement n'ont eu aucun effet sur les prix du riz, du sucre, de l'huile, du savon ni des pâtes alimentaires. Et il nous en donne les raisons: "Nous avons acheté nos marchandises à un certain prix relativement élevé, il y a de cela plusieurs semaines. Et aujourd'hui, sans nous avoir contactés auparavant, on nous demande brusquement de vendre moins cher ces mêmes marchandises. Pourquoi?" M. Soudré reconnaît que les prix d'achat de certains produits ont baissé sur le marché, suite à la suspension des droits de douane. Et sachant qu'il s'agit d'une mesure transitoire, il a décidé de mettre sous embargo son ancien stock, attendant que les prix flambent de nouveau. Et cela, il le dit ouvertement à ses clients: "Actuellement, je ne peux rien vendre en gros, revenez plus tard", a-t- quelques fois répondu à ses clients détaillants en notre présence. Il s'indigne même à l'idée que le gouvernement veuille faire obligation aux commerçants de baisser les prix: "Comment quelqu'un peut-il décider de faire baisser le prix d'une marchandise qu'il n'a pas achetée?" s'est-il interrogé, avant de conclure que le gouvernement cherche à mettre les commerçants en conflit avec les consommateurs. En guise de solution, M. Soudré propose au gouvernement de s'engager à travers une note officielle, à indemniser tous les commerçants détenteurs d'anciens stocks. C'est seulement à ce prix, selon lui, que ces marchandises pourraient être cédées aux prix suggérés par l'Etat. Calculatrice en main, il a tenté d'évaluer la perte d'un commerçant qui accepterait de vendre son ancien stock de riz, par exemple, aux nouveaux prix indiqués par le gouvernement. La baisse des prix, pour lui, c'est environ 1000 F de moins sur le sac de 50 kg. "Alors, un commerçant qui avait déjà acheté par exemple 9 mille tonnes (soit 180 000 sacs) de riz importé au moment de la flambée, et qui accepte de le revendre au prix suggéré perdra 1000 fois 180 000, soit 180 millions de francs. Qui peut accepter ça ?"

Chez le boutiquier Moussa Kaboré de Nabi Yaar, il y a une légère baisse des prix des marchandises listées par le gouvernement. Il a dit avoir mis en application les suggestions de prix faites par le gouvernement, et a naturellement perdu sur le petit stocks de riz dont il disposait avant la nouvelle mesure. Ainsi, il vend le sac de 50 kg de riz indien à 13 600 F au lieu de 14 000 F; le paquet d'un kg de sucre de la SN Sosuco est cédé à 600, au lieu de 625 F. Les autres produits tels que l'huile Savor, le savon SN Citec, les pâtes alimentaires (Pastani) n'existent plus sur les étagères de M. Kaboré.

Boureima Tiendrébéogo, détaillant de marchandises diverses à Zaabre Daaga, dit ne pas souvent s'entendre avec ses clients, très informés qu'ils sont, par rapport aux nouveaux prix publiés par le gouvernement. "J'essaie de leur expliquer que je me suis approvisionné avant la décision du gouvernement, mais rien à faire: ils m'en veulent de vouloir grossir la marge bénéficiaire". Pas donc beaucoup de changement de prix chez lui: le kg de riz blanc indien, Vietnamien ou Thaïlandais est vendu à 300 ou 325 F. Ne disposant pas de l'huile de production nationale, il vend le litre d'une huile importée de Singapour (Vin King) à 590 F CFA.

 

Paul-Miki ROAMBA

Le Pays du 13 mars 2008



12/03/2008
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