L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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"Naturellement que je serai candidat en 2010" (Gilchrist Olympio du Togo)

Gilchrist Olympio du Togo

"Naturellement que je serai candidat en 2010"

En cette matinée du dimanche 6 juillet 2008 aux environs de 8 heures, Gilchrist Olympio, le président de l’Union des forces du changement (UFC), nous reçoit dans la chambre 530 de l’hôtel Sofitel Ouaga 2000, où il a installé ses pénates depuis deux jours. Présent dans la capitale burkinabè pour échanger avec Blaise Compaoré, le facilitateur du dialogue intertogolais, il a évoqué avec nous les aspects de cet échange, sa plus que probable candidature à la présidentielle de 2010, même s’il tente d’entretenir un faux suspense, le pourquoi de l’absence de son parti du gouvernement, et de ... Faure.

Monsieur le président de l’UFC, quelle est la raison de votre présence à Ouagadougou ?

• Comme vous le savez, le facilitateur du dialogue intertogolais est le président du Faso, Blaise Compaoré. Nous le consultons donc de temps en temps sur les problèmes épineux du Togo. Plus spécifiquement, je suis venu le voir au sujet de la mise en œuvre de l’Accord politique global (APC) de Ouaga, obtenu avec son assistance. Actuellement, nous assistons à de l’immobilisme depuis notre dernier contact avec le gouvernement, qui remonte au mois de novembre 2007.

Après ce contact, nous avons cru qu’on allait continuellement se concerter sur les problèmes qui nous préoccupent, à savoir les réformes institutionnelles et constitutionnelles du pays. Le Togo, comme vous le savez, a subi, avant la mort du président Gnassingbé Eyadéma, de profonds changements politiques, notamment relatifs à la Constitution.

Ainsi, celle que nous avons votée à l’unanimité, à 95%, en 1992, a été complètement tripatouillée par le biais d’une Assemblée nationale monocolore. Nous aimerions qu’on toilette l’actuelle Constitution pour revenir à celle de 1992. C’est de cela que j’ai discuté avec le président Compaoré. J’ai également évoqué avec lui la question de la mise en place d’un cadre national et démocratique pour les discussions à venir.

Nous avons eu le dialogue intertogolais, mais ce dialogue a rassemblé des gens dont on ignorait la représentativité de certains. Mais après les législatives d’octobre 2007, il y a eu une certaine clarification du paysage politique togolais. Nous avons discuté donc avec le présent Compaoré de l’opportunité de la mise en œuvre d’un nouveau cadre, avec la nouvelle configuration politique qui s’est dessinée au Togo.

A propos des législatives, ce scrutin a consacré l’UFC comme la deuxième force politique du pays, avec 27 députés contre 50 pour le RPT. On s’attendait à ce que votre parti soit représenté dans le bureau de l’Assemblée nationale. Contre toute attente, le jour de la mise en place dudit bureau, vous avez claqué la porte. Pourquoi ?

• Nous n’avons pas claqué la porte. Il se trouve que malgré les fraudes et toutes les irrégularités, 900 000 Togolais ont voté pour l’UFC et le même nombre a voté pour le RPT. Mais, avec le découpage démentiel, on s’est retrouvé avec 27 sièges contre 50 pour le pouvoir en place. Il est tout a fait normal que le parti gouvernemental nomme le président de l’Assemblée. Ce qui a été fait. Nous avons cru au début, un peu naïvement, que le rôle de 1er vice-président incomberait naturellement à l’UFC, cela n’a malheureusement pas été le cas...

Pourquoi ?

• Parce que le gouvernement a refusé cela et a encore nommé un premier vice-président issu du RPT. J’ai compris que c’est suite aux chaudes discussions que j’ai eues avec le président Faure Gnassingbé qu’on nous a refusé ce poste. Nous avons donc décidé de travailler en tant que simples parlementaires, des gens élus par le peuple, et non choisis par le gouvernement.

L’UFC a refusé également d’entrer dans le gouvernement du Premier ministre Mally. Quelles ont été les raisons de cette option ?

• J’ai eu deux ou trois discussions avec le président Faure Gnassingbé. D’abord à Saint-Egidio à Rome, à Ouaga, à Lomé, sous le parrainage du président Blaise Compaoré. Nous avons cru comprendre alors, que Faure restait président pendant cette période de transition et l’UFC devait désigner le Premier ministre.

Le moment venu, on nous a fait savoir que le RPT allait se choisir un Premier ministre, qu’il n’était pas question que l’UFC le fasse. Nous avons dit alors que, dans ces conditions, nous nous en retirons, surtout que les lois en vigueur au Togo donnent plein pouvoir au président pour nommer et révoquer les ministres et le Premier ministre comme il veut. Nous avons donc voulu savoir au préalable le rôle des ministres UFC que nous allions envoyer au gouvernement, mais cela ne nous a jamais été expliqué.

Ne pensez-vous pas que c’est un peu fort de café de vouloir imposer des ministres et un PM à un chef de l’Etat ? L’UFC n’est-elle pas dans une position maximaliste ?

• Pas du tout ! D’abord, la Constitution que nous reconnaissons, celle de 1992, consacre au Togo un système semi-parlementaire, basé sur le système français. Cela veut dire que le président de la République a plein pouvoir, à condition qu’il ait plein pouvoir au Parlement. Ces dispositions ont été changées de façon arbitraire par le président Eyadéma 18 mois avant sa mort. Le pouvoir est devenu de facto un régime présidentiel.

Une chose que nous n’avons jamais acceptée. C’est le but de notre lutte : nous aimerions retourner à un régime semi-parlementaire, un régime dans lequel les élus du peuple ont le droit de nommer un PM. Ce qui éviterait que le pouvoir soit concentré entre les mains d’une seule personne, car notre expérience de 45 ans a prouvé qu’une telle concentration est mauvaise.

L’UFC tiendra un congrès les 19 et 20 juillet prochains. Quelles sont les grandes décisions attendues de ce congrès ?

• Il s’agit d’un congrès extraordinaire, ce n’est donc pas un congrès statutaire, contrairement à ce que certains affirment dans les journaux et dans la presse en général. Nous avons estimé qu’un tel rassemblement était important et opportun parce que notre parti a pris énormément d’ampleur dans le pays.

L’UFC était concentrée dans certaines régions du Togo, car elle est constituée du rassemblement de plusieurs petits partis, qui s’y sont fondus. Le parti s’est élargi et couvre la quasi-totalité du pays de nos jours. Il est donc fondamental qu’on se retrouve et qu’on discute de la cohésion interne du parti et des moyens de gérer ce parti.

Les décisions attendues de ce congrès sont importantes, elles sont quantitatives et qualitatives.

Il y a aussi le fait que beaucoup de jeunes gens, qui sont dans le parti depuis longtemps, sont, à présent, des personnes mûres, avec des professions diverses, et il va falloir les inclure dans les centres de décision du parti ; sans oublier nos femmes, qui sont restées les piliers de l’UFC (politique, social et même monétaire), et qui doivent aussi avoir des rôles importants dans la hiérarchie du parti.

Enfin, le congrès extraordinaire sera un congrès d’investiture. Au cours de ce congrès, nous allons nommer celui qui sera le porte-drapeau de l’UFC à la présidentielle de 2010. Et mettre notre parti en position de lutte permanente afin que des aspects de certaines lois telle l’exclusion soient rayés des livres de notre pays.

Vous aurez remarqué aussi que, depuis 1961, nous n’avons jamais eu d’élections locales. Il faut qu’on voie aussi ce volet pour savoir comment nous allons arracher au pouvoir l’organisation de ce scrutin local pour avoir des maires et des conseils municipaux.

Serez-vous candidat à la présidentielle de 2010 ou l’UFC va-t-elle miser sur un autre champion ?

• Il ne faut pas préjuger des choses. Je suis le fondateur de l’UFC et en même temps le président de son bureau national. Au cours des discussions, nous allons donner l’onction à quelqu’un pour être notre porte-parole à cette présidentielle. Ça peut être moi ou quelqu’un d’autre. Nous le saurons au congrès extraordinaire.

Si vous devez porter un jugement sur les actions du président Faure Gnassingbé ?

• Très difficile de faire une appréciation, car je ne vois pas beaucoup de changements. On est en présence du même appareil de répression qu’on a connu sous son père, et ce, pendant 40 ans. Par exemple, le ministre de l’Intérieur, chargé de la Sécurité, est un monsieur doigté dans le rapport des Nations unies comme l’un des responsables des tueries de 2005, lors de la présidentielle. Le président de la Cour constitutionnelle est un monsieur bien connu également, qui excelle dans les condamnations à mort et les lancements de mandats d’arrêt contre les opposants.

C’est dire donc que l’appareil et le système qui prévalaient sous le père sont toujours là. Cependant, il y a un minimum de changement tout de même. La preuve est que je rentre et je sors du Togo comme je veux, en ce moment. Mais je n’oublie pas, comme on le dit, qu’il ne faut pas tenter le diable, il faut toujours aller au Togo avec un minimum de circonspection.

Les bailleurs de fonds, notamment l’UE, ont pourtant rouvert les vannes, estimant que le Togo a souscrit au 22e engagement avec l’organisation des législatives ?

• Dire que les 22 engagements ont été tenus, c’est aller très vite en besogne. C’est maintenant qu’on va voir si l’on aura des élections libres et transparentes. Le dernier rapport de l’UE et des parlementaires européens mentionne que, pour une des rares fois, on a organisé des élections au Togo et il n’y a pas eu d’effusion de sang, mais il n’a jamais été signifié que les choses se sont bien passées.

Le rapport de Mme Carlotti, la présidente du groupe parlementaire européen, est très clair là-dessus. Disons qu’une partie des fonds de l’UE a été débloquée, la plus grande partie ne l’a pas été et on attend de voir comment les choses vont évoluer. Il y a d’autres bailleurs de fonds qui attendent également de constater la stabilité politique, sociale et économique, et surtout la mise en place d’institutions démocratiques avant de délier les cordons de la bourse.

Et je puis vous affirmer qu’il y a toujours des pressions qui sont exercées sur le régime. J’ai eu l’occasion de discuter avec le ministre allemand des Affaires étrangères, M. Steigmeir, lorsqu’il était en visite au Togo. Il nous a répété ce qu’il a dit au président Faure : "Vous respectez les 22 engagements et éventuellement l’Accord politique global, et nous serons à vos côtés, mais nous attendons de voir".

Interview réalisée par

Z. Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga du 9 juillet 2008



09/07/2008
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