L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Rentrée scolaire : L'envers du décor

Rentrée scolaire

L'envers du décor

La rentrée des classes pour les élèves du primaire et du secondaire s'est officiellement effectuée le 1er octobre 2007. Si dans de nombreuses familles, des parents ont hâte que leur progéniture reprenne le chemin de l'école pour les épargner des chahuts et des tracasseries de toutes sortes dont seuls sont capables des enfants de cet âge, dans d'autres au contraire, la rentrée scolaire est un temps d'insomnies. Car, elle ne se présente pas de la même manière pour tous les Burkinabè. Si pour certains parents, la rentrée des classes est le temps attendu pour submerger l'enfant d'outils de toutes sortes, après qu'ils l'eurent inscrit dans les établissements les plus huppés de la place, pour d'autres, et ce sont les plus nombreux, c'est le calvaire. L'envers du décor, pourrait-on dire.

Et comme désormais dans ce pays, les gens n'ont plus peur de Dieu, c'est le moment que choisissent des individus sans foi pour escroquer des parents d'élèves désemparés. Ne dit-on pas que quelqu'un qui se noie est prêt à s'accrocher au serpent qui passe parce que pour lui il s'agit d'un morceau de bois? C'est ainsi que des personnes indélicates exploitent le désarroi de parents d'élèves en leur promettant d'inscrire leur rejeton dans la classe désirée, après avoir empoché de fortes sommes, souvent le fruit des dernières économies de ces pauvres et incrédules parents. Généralement, après avoir dépouillé des pères et des mères, ces individus sans scrupules qui se font passer pour des responsables dans les établissements disparaissent. Mais auparavant, pour se rendre plus respectables, mais surtout pour se faire prendre plus au sérieux, ils conduisent leurs victimes devant la porte du bureau du proviseur en leur recommandant d'attendre quand on va appeler leur nom. On parle de cette émouvante scène où une vieille dame, après le départ de tout le monde, tenait toujours son rang. Et quand on lui a demandé qui elle attendait, elle a expliqué qu'elle a remis à un homme de l'argent pour l'inscription de son petit-fils, qui lui a dit d'attendre qu'on l'appelle. Quand on a fait comprendre à la vieille femme qu'elle a été la victime d'un vil escroc, elle a fondu en larmes.

Malheureusement, dans ce Burkina d'aujourd'hui, peu d'entre nous s'émeuvent en voyant une vieille pleurer parce qu'elle a été escroquée.

Ce n'est pas la première fois que nous écrivons sur les questions de l'école. Ce ne sera sans doute pas la dernière fois. A toutes les occasions, nous avons loué les efforts faits par l'État dans le domaine de l'alphabétisation, de la scolarisation, de l'éducation et de la formation. Des efforts méritoires comme la gratuité des manuels scolaires et le fait de rendre l'école obligatoire et gratuite pour tout Burkinabè âgé de 6 à 16 ans. Aujourd'hui, cependant, l'offre éducative est insuffisante comparée à la demande. Il est fréquent de voir encore dans les rues des villes et des campagnes, des garçons et des filles non scolarisés, parce tout simplement leurs parents n'ont pas les moyens financiers nécessaires pour les envoyer à l'école. Pour les parents qui arrivent à envoyer un ou deux enfants à l'école, la somme de sacrifices consentis est énorme. En ville, les parents sont obligés de creuser à chaque rentrée scolaire "un trou pour boucher un autre trou", pour emprunter une expression célèbre.

Certes, l'État a fait des efforts louables. Mais quand on examine les choses de près, la plus grande part du fardeau de l'éducation est supportée aujourd'hui par les parents. Un exemple: le moyen de déplacement de l'enfant, s'il est en âge de conduire un vélo ou un moteur. Qui dit motocyclette, dit carburant dont chacun connaît la cherté. L'impact du prix du carburant est particulièrement ressenti par les parents astreints à la corvée d'amener les enfants à l'école, de les ramener à midi, de les déposer le soir et de les reconduire à la maison à la sortie des bureaux. Le manque d'initiatives des privés pour créer une structure de transport pour élèves et étudiants rendent les problèmes de notre école encore plus aigus. Le transport des jeunes écoliers et leur sécurité sur la route sont des tâches régaliennes de l'État républicain, si tant est qu'il veuille donner les mêmes chances à tous les enfants de ce pays. Car il demeure vrai que l'éducation d'un enfant, c'est un investissement. C'est, pour le cas du Burkina Faso, un investissement à très long terme. Il n' y a donc que le l'État, avec tout ce que lui confère la puissance publique comme pouvoirs, qui peut relever le défi que constituent l'alphabétisation, la scolarisation, l'éducation et la formation dans nos sociétés.

Un dernier fait a retenu notre attention au cours de cette rentrée scolaire qui hante le sommeil de bien des parents, empêche d'autres de siffler une bière, dévie les voies habituelles de nombreuses personnes qui faisaient un tour chez le rôtisseur du coin : la publicité sur les établissements d'enseignement. Dans de nombreux cas, cette publicité est loin de la vérité. Elle contribue à livrer les parents entre les mains de commerçants sans vergogne qui vont passer le temps à les traumatiser pour le paiement des frais de scolarité. Il serait donc souhaitable que chaque année, une structure indépendante des ministères, contrôle les établissements d'enseignement privés primaires, secondaires et supérieurs, et publie un rapport circonstancié qui pourrait servir de guide aux parents pour placer leurs enfants.

L'éducation et la formation des jeunes Burkinabè sont des tâches qui interpellent chaque citoyen de ce pays. S'il y a faillite, c'est celle de toute la nation.

"Le Fou"

Le Pays du 5 octobre 2007



05/10/2007
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