L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Sarkozy à Dakar et à Libreville : Je règle mes pas sur les pas de mes prédécesseurs

Sarkozy à Dakar et à Libreville

Je règle mes pas sur les pas de mes prédécesseurs

 

Le tout nouveau locataire de l’Elysée est en tournée en Afrique. Cette virée de Nicolas Sarkozy au sud du Sahara est en fait la concrétisation d’une promesse que l’homme pressé avait faite, à savoir visiter notre continent le plus rapidement possible après sa prise de fonction, qui est intervenue le 16 mai 2007. Mais alors que ce sont des pays anglophones, comme l’Afrique du Sud (puissance continentale), le Ghana de John Kufuor (qui préside aux destinées de l’Union africaine), qui avaient initialement été ciblés, ce sont finalement et bêtement deux anciennes colonies françaises qui ont été choisies. Après une nuit sous la tente de Mouammar Kadhafi à Tripoli (celui-ci avait consenti quelques jours plus tôt à l’extradition des infirmières et du médecin bulgares accusés d’avoir contaminé une centaine d’enfants libyens par le virus du SIDA),  le voilà hier jeudi à Dakar au Sénégal, et aujourd’hui vendredi 27 juillet 2007 à Libreville, capitale du Gabon. Ces deux pays, on le sait, sont deux réalités emblématiques dans ce qui reste jusqu’à preuve du contraire le pré carré français sur le continent noir. N’est-ce pas l’avis du porte-parole de l’Elysée, David Martinon,  pour qui le Sénégal et le Gabon sont des «partenaires extrêmement privilégiés sur le continent africain»? Que dire donc d'une rupture quand on sait que les liens économiques, politiques, humains et autres unissent les deux pays à leur ancienne métropole, laquelle, on sait, y dispose  d’importantes bases militaires (1 100 hommes au Sénégal et 800 au Gabon) ?

Le choix de la patrie de Senghor pour la visite de Sarkozy s’expliquerait par le fait qu’elle est un exemple de démocratie stable en Afrique francophone, avec une transition sans grands heurts en 2000 entre Abdou Diouf et le célèbre chauve de Dakar, même si 7 ans plus tard la réélection d’Abdoulaye Wade a été entachée de contestations de la part des magnats de l’opposition sénégalaise, qui n’ont pas hésité à boycotter les législatives du 3 juin dernier.

Pour ce qui est du pays de Léon Bâ, quelles que soient ses velléités, le petit Nicolas devenu grand ne saurait oublier qu’Omar Bongo Ondimba, aujourd’hui âgé de 71 ans et au pouvoir depuis 1967, reste et demeure  le doyen des chefs d’Etat africains. N’a-t-il pas été le premier à qui Sarkozy a téléphoné après son élection à la présidence française et l’un des tout premiers à être reçu à l’Elysée peu après son investiture ?

Accompagné dans sa tournée africaine de Bernard Kouchner, son ministre des Affaires étrangères, de Jean-Marie Bockel de la Coopération et de la secrétaire d’Etat aux droits de l’homme, la Sénégalaise d’origine Rama Yade, le président de tous les Français a retenu la capitale de l’ancienne Afrique occidentale française pour donner sa compréhension du nouveau «partenariat» entre l’Afrique et la France. Cette relation, selon le porte-parole David Martinon, se résume à la franchise et à la transparence entre des partenaires égaux et responsables.

En tout état de cause, au Sénégal où les jeunes désabusés par la crise de l’emploi continuent d’opter au péril de leur vie pour l’aventure en Europe, c’est, disait-on hier, un langage de vérité qui attendait le premier des Français, lui qui prône l’«immigration choisie» et qui, paradoxalement, n’était pas avec son ministre chargé de l’Immigration et de l’Identité nationale, Brice Hortefeux. Tout laisse donc croire que ce n’est pas un sujet d’échanges que Sarkozy entend servir à ses hôtes, préoccupé plutôt qu’il est, à poursuivre, comme ses prédécesseurs, la politique qui a toujours été celle de son pays vis-à-vis de l’Afrique. En fait, la «Franceafrique» reste là, la realpolitik aussi, le cynisme parfois ; les Etats en réalité n’ayant que des intérêts, pas  d'amis. De ce point de vue, nous pensons qu'Abidjan eût été une des toutes premières étapes obligées de la visite de Sarko, n’eût été la situation qu’elle vit depuis septembre 2002 et de laquelle elle est en train de sortir.

Il est vrai qu'à Dakar il a prêché pour une politique débarrassée  de tout parternalisme, de tout clientélisme, dans l'intérêt bien compris des différentes parties, donc des intérêts égaux. Mais derrière les mots et les intentions, on attend de voir.

En tout cas, à en juger par le choix des deux pays, on ne peut manquer de penser au titre de la célèbre comédie dramatique de Rémi Waterhousse : «Je règle mon pas sur le pas de mon père» (ndlr). En d'autres termes, notre Sarkozy est inéluctablement en train de régler ses pas sur ceux de ses prédécesseurs.

 

 

D. Evariste Ouédraogo

L’Observateur Paalga du 27 juillet 2007

 

Ndlr : Ce film a été l’une des deux réalisations de Rémi Waterhousse en 1999.



26/07/2007
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