L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

L'Heure     du     Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

Sénégal : Si l’opposition est peureuse, la majorité est frileuse

Sénégal

Si l’opposition est peureuse, la majorité est frileuse

 

Le Sénégal est-il à la croisée des chemins de la démocratie ? La question n’est pas dénuée de tout sens quand on sait qu’au lendemain de son investiture, le président Abdoulaye Wade fait face à une fronde, menée par la frange la plus significative de son opposition, qui a décidé de boycotter les élections législatives et locales du 3 juin  2007.

 

C’était en fait une menace qui  a fini par se concrétiser par la force des choses. En effet, dans une déclaration commune adressée au chef de l’Etat le 22 mars 2007, douze leaders de l’opposition, dont quatre anciens candidats à la présidentielle du 25 février dernier, ont appelé à des négociations sur le processus électoral.

 

En fait, ces partis «exigent la création d’une structure indépendante chargée de l’organisation des élections et la redéfinition concertée du calendrier électoral républicain». En clair, il s’agit d’un report du scrutin de juin prochain, le temps de procéder à un toilettage du fichier électoral et à la formulation de stratégies pour éviter, sinon minimiser, les fraudes lors des consultations électorales.

 

C’est en raison du refus de Wade d’ouvrir des négociations avec toute la classe politique et la société civile que les opposants ont opté pour cette solution extrême, à savoir le boycott pur et simple des scrutins législatifs et locaux prévus pour se tenir dans moins de deux mois. Et de fait, ils sont vite passés de l’acte à la parole, puisqu’aucune de leurs listes n’a été enregistrée à l’arrêt officiel du dépôt des listes de candidatures à ces élections.

 

Sauf retournement de situation donc, le pays de la Teranga s’achemine vers un parti unique de fait avec un Parlement monocolore. En effet, si les partis significatifs ne prennent pas la ligne de départ, il est évident que le Parti démocratique sénégalais (PDS), au pouvoir va rafler la quasi-totalité des fauteuils en jeu. Dans ce cas, ce serait un recul grave de la démocratie dans ce pays, longtemps cité en exemple sur le continent.

 

Paradoxalement, il est loisible de constater que la situation de la démocratie sénégalaise se dégrade dangereusement depuis que Me Abdoulaye Wade a pris les rênes du pouvoir après avoir végété durant un quart de siècle dans l’opposition. En effet, depuis, journalistes et opposants ont parfois eu maille à partir avec le pouvoir de Dakar. Tout cela n’est pas du tout à l’honneur du président.

 

Le pape du «Sopi» gagnerait à revoir sa copie, à lâcher un peu du lest pour permettre à toutes les formations politiques de prendre part à ces scrutins. Pour avoir remporté à près de 56% l’élection présidentielle, il doit avoir l’élégance d’accepter les négociations sur le processus électoral tout comme le report consensuel de ces consultations à une date consensuelle.

 

On ne  peut peut-être pas l’imaginer au Sénégal, mais il est bon de garder à l’esprit que toute politique d’exclusion doublée de l’absence du dialogue conduit à coup sûr à des violences, voire à des rébellions. Ca n’arrive pas qu’aux autres.

 

Le système électoral sénégalais n’est sans doute pas parfait, mais on ne peut pas pour autant donner le bon Dieu sans confession aux opposants. Car, déroutés par la déculottée que Wade leur a infligée à la présidentielle de février 2007, ils veulent maintenant  voir clair avant de s’engager. Derrière ce boycott, il y a sans doute la peur qu’éprouvent les opposants de prendre de nouveau une douche froide après celle de février.

 

De son côté aussi, le pouvoir, très frileux, ne voit pas la nécessité de changer un système qui lui a assuré récemment une large victoire. La crainte dans le camp de Wade est de voir s’effriter ses positions à l’issue des élections.

 

Mais dans ce pays réputé être celui du consensus, on espère que les uns et les autres mettront un peu d’eau dans leur vin et qu’un modus vivendi sera trouvé pour que le pays de la Teranga ne démérite pas de sa renommée de grande démocratie africaine.

 

San Evariste Barro



09/04/2007
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 1021 autres membres