L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Une mine comme dernière demeure

UN ÉBOULEMENT FAIT 3 MORTS À DOSSI

Une mine comme dernière demeure

La recherche du métal précieux dans des conditions quasi moyenâgeuses tourne souvent au drame pour de nombreux orpailleurs. Trois d’entre eux ont de nouveau trouvé la mort suite à un éboulement jeudi dernier dans le Tuy et plus précisément dans le village de Dossi.

C’est aux environs de 19 heures ce jeudi 26 juillet 2007 que nous avons appris qu’un drame venait de se produire dans la province du Tuy et plus précisément dans le département de Boni à environ 130 km de Bobo : trois personnes ont trouvé la mort dans un éboulement à Dossi, village situé à une trentaine de km de la ville de Houndé. Arrivée très tôt dans la matinée du vendredi 27 à Boni, notre équipe de reportage n’eut aucune peine à repérer le chemin qui mène à Dossi. Un véhicule des sapeurs-pompiers stationné à quelques mètres du bitume sur une piste rurale nous indiquait déjà la direction du site aurifère où le drame avait eu lieu la veille.

Nous nous renseignons malgré tout auprès des secouristes, calés dans leur véhicule et qui regardaient le temps passer. « Si nous sommes restés bloqués ici, c’est parce que la route est impraticable. Nous vous déconseillons de trop vous aventurer sur cette voie sous peine de vous embourber comme d’autres véhicules que vous verrez plus loin », ont-ils laissé entendre. Notre voyage serait donc plus pénible qu’on ne le croyait ; car, après avoir avalé 130 km, nous étions désormais obligés d’abandonner notre véhicule pour poursuivre notre chemin à pied. Et nous voilà partis pour quatre kilomètres de marche dans la boue et les flaques d’eau avant d’atteindre notre destination finale. Il est presque 10 heures 30 quand nous débarquons, c’est le cas de le dire, à Dossi. Niché au flanc des collines qui l’entourent, ce village est depuis février dernier le principal centre d’affaires de la province du Tuy. Outre les Burkinabè, qui y résident, on y trouve également des Maliens et des Nigérians, tous venus à la recherche de l’or ou pour d’autres activités connexes. Car à l’instar des autres sites aurifères du Burkina, Dossi connaît certains fléaux comme la prostitution, la drogue et l’alcoolisme.

Une ambiance festive malgré le drame

En cette matinée du vendredi 27 juillet et seulement 24 heures après le drame, le village vivait pourtant au rythme habituel. Le marché grouillait de monde, des orpailleurs se préparaient à rejoindre leur site tandis que dans certains maquis des clients savouraient tranquillement leur bière. Et c’est dans l’un de ces débits de boissons que nous allons nous installer, quelque peu ébahis par l’ambiance festive malgré cet éboulement qui a provoqué la mort de trois personnes. A l’évidence, personne ne semblait s’émouvoir outre mesure de ce tragique accident. A la suite des autorités provinciales, qui nous avaient précédés quelques instants sur les lieux du drame, nous allons nous y rendre accompagnés d’un guide que le chargé de la sécurité du site, Benjamin Compaoré, avait désigné sur instruction du préfet de Boni, Adolphe Koala. Encore des efforts supplémentaires pour notre équipe de reportage qui se devait alors de grimper cette colline d’une hauteur d’environ 100m. Ce qui était loin d’être une partie de plaisir pour nous, car, après 130 km de voiture et quatre km à pied, il n’était pas évident que nous ayons encore les ressources physiques nécessaires pour surmonter cette nouvelle épreuve. Nous y parviendrons tout de même avec l’aide de l’accompagnateur qui nous conduira jusqu’au sommet de la colline. Et nous voilà devant une large ouverture d’une profondeur d’environ 15m. "C’est là que les trois corps sont ensevelis", nous apprend notre guide avant d’ajouter que toutes les tentatives pour les retrouver afin de les ramener à la surface ont été vaines. Cependant, un groupe d’orpailleurs que nous avons trouvés sur les lieux s’affairaient encore à extirper une des victimes à l’aide d’une corde, mais en vain.

Comme si de rien n’était à Dossi

De ceux qui s’étaient aventurés dans ce trou, un seul rescapé, que nous n’avons malheureusement pas trouvé sur place et qui, dit-on, s’en est tiré avec de légères blessures au crâne. Renseignements pris, il serait à Houndé et même qu’il aurait déjà quitté l’hôpital pour une destination inconnue après qu’il eut reçu des soins. Reste maintenant à savoir les circonstances de ce drame qui serait une première à Dossi. De l’avis général, les victimes, comme c’est souvent le cas, savaient bien qu’elles encouraient un grand danger en allant creuser dans cette zone, momentanément abandonnée par son propriétaire compte tenu des énormes risques d’éboulement en cette période d’hivernage. Est-ce la raison de cette apparente indifférence des populations devant une telle tragédie ? On ne saurait le dire. Toujours est-il que dans ce patelin peuplé d’environ mille cinq cents âmes, la vie poursuivait son cours normal avec ces gargotes qui continuaient de distiller à fond la musique et ces cabarets qui ne désemplissaient pas. L’ambiance, nous dit-on, serait encore plus électrique la nuit tombée. Car, à Dossi, nous apprend le coordonnateur des orpailleurs, Abdou Sankara, il y a un groupe électrogène qui alimente le site en électricité et qui permet aux différents maquis, à la salle vidéo et à la bibliothèque de fonctionner jusqu’au petit matin. Le moins que l’on puisse dire est que la mort des trois orpailleurs semble relever déjà du passé pour les « Dossiens » qui regardent désormais l’avenir avec plus d’espoir. Car, selon certaines croyances à vérifier, de telles tragédies sont le signe de l’existence du métal précieux en abondance.

Jonas Apollinaire Kaboré

L’Observateur Paalga du 30 juillet 2007



30/07/2007
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