L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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21 condamnations dont une à mort (assises criminelles à Dédougou)

ASSISES CRIMINELLES A DEDOUGOU

21 condamnations dont une à mort

La première session des assises de la chambre criminelle de la Cour d'appel de Bobo siégeant à Dédougou a pris fin le 23 février 2008. Au terme de 6 jours d'audience, 21 condamnations ont été prononcées. Parmi elles, une peine de mort.

Une peine de mort, un emprisonnement à vie, trois condamnations à 10 ans ferme, quatre à 10 ans avec sursis, trois à 5 ans ferme, huit à 5 ans avec sursis, un à 3 ans ferme, deux acquittements et un renvoi. Telles sont les peines prononcées par la chambre criminelle de la Cour d'appel de Bobo siégeant à Dédougou. Pour les audiences ayant abouti à ces différents délibérés, la salle du tribunal de grande instance de Dédougou, qui a abrité les assises, ne désemplissait pas. Travailleurs, commerçants, élèves et paysans de tous les âges et des deux sexes ont suivi avec beaucoup d'attention, et souvent tard dans la nuit, les audiences. La gravité des faits reprochés aux accusés en a été sans doute la raison. Cette session a été l'une des rares circonstances au cours de laquelle, la chambre criminelle de Bobo s'est départie de sa légendaire discrétion. Les juges astreints au silence par leur devoir d'impartialité et leur obligation de réserve ont laissé avoir dire le droit a été atteint. Toutefois, l'appréciation de l'impact social incombe aux judiciaires. Ces derniers, dans leur majorité, disent avoir tiré beaucoup d'enseignements. Ils regrettent cependant que les accusés n'aient pas été jugés plus tôt. En effet, des accusés qui bénéficiaient d'une liberté provisoire et dont certains s'étaient repentis et réconciliés avec les parents des victimes retournent en prison. Vingt-deux des vingt-quatre accusés se sont présentés à la barre. Les 2 autres, qui ont pris la poudre d’escampette après libération provisoire, ont été jugés par contumace. Le plus ancien dossier date de 1990 et le plus récent, de 2002. Les accusés condamnés ont confessé publiquement être les auteurs des faits à eux reprochés. Malheureusement (ou heureusement c'est selon), certains qui se sont répentis et bénéficiaient d'une réinsertion sociale retournent en prison pour purger au minimum 3 années et d'autres s'en tirent avec des peines assorties de sursis. La plupart des meurtres, de coups mortels ou d'assassinats pour lequels certains accusés ont été jugés étaient liés à des vengeances sentimentales ou à des faits occultes. L'observation stricte du calme et de la sérénité dont a fait preuve l'assistance a été saluée à sa juste valeur par le président de la cour d'appel de Bobo. Il ressort des indiscrétions, qu'une autre session pourrait se tenir à Dédougou d'ici la fin de l'année judiciaire en cours. Elle permettra sans doute de désengorger le rôle de la chambre criminelle. Pour rappel, la Cour d'appel de Bobo couvre les régions des Hauts Bassins, de la Boucle du Mouhoun, du Sud-Ouest et des Cascades. Elle est la juridiction d'appel des jugements rendus en premier ressort par les tribunaux de grande instance de Bobo, de Dédougou, de Gaoua, de Banfora, de Boromo, de Tougan ainsi que les tribunaux de travail et d'instance de Bobo.

Serge COULIBALY

Le Pays du 7 mars 2008

 

ENCADRE

Vu et entendu aux assises

* Un Zakalia Koté peut en cacher un autre

Parmi les jurés tirés au sort figurait un Zakalia Koté, l'homonyme parfait du ministre de la justice. Le juré s'est malheureusement excusé et s'est désisté pour l'organisation des obsèques de son père décédé le jour même de l'ouverture des assises. Des yeux se sont écarquillés pour voir la bobine de ce juré et quelqu'un de dire qu'à moins d'un hasard de la méiose, le juré en question n'est pas membre du gouvernement. Qu'à cela ne tienne, Zakalia Koté juré tiré au sort et Zakalia Koté ministre de la justice, sont tous Dafing de Douroula.

* Un accusé sur civière

Accusé d'assassinat en 1990, un sexagénaire a dû être transporté sur une civière dans la salle d'audience. Ce dernier qui, à tort ou à raison, est qualifié de malade mental a pourtant eu des propos très cohérents. Mieux, il a demandé de traduire terre à terre les propos des témoins. Condamné à 10 ans de prison avec sursis, l'accusé n'a pas daigné regretter son acte. Pire, il a laissé entendre que si c'était à recommencer, il agirait de la même manière.

* Un pasteur parmi les accusés

Après avoir passé plus de 5 ans en détention préventive pour assassinat, un accusé s'est reconverti au christianisme, avant de devenir pasteur dans une église de son village. Son avocat a, dans sa plaidoirie, demandé à la cour de ne pas rompre la chaîne de la nouvelle vie que son client a commencé à construire. Il a écopé d'une peine de 10 ans avec sursis

* La guerre des certificats de décès et/ ou médicaux

Le parquet général et les avocats de la défense ont passé tout le temps à faire la guerre des certificats. D'un côté, la défense crée des incidents pour l'absence de certificat de décès et demande au parquet d'apporter la preuve qu'il y a eu mort d'homme. De l'autre, c'est le parquet qui réclame un certificat médical pour prouver que les accusés ont été victimes de coups et blessures. Cette situation, souvent amusante, était du goût de l'assistance qui, discrètement, a apprécié la valeur des deux parties. "C'est une question d'école" a laissé entendre une personne et une autre de se demander "Qui connaît mieux que l'autre" En tout cas, certains s'étonnaient de voir juges et avocats en ville prendre ensemble un pot après la suspension de l'audience.

* Défaut de sonorisation

Tout le monde a déploré l'absence de la sonorisation lors des assises criminelles de Dédougou. Les propos des uns et des autres étaient à peine audibles. Il fallait être parmi les premiers dans la salle pour être plus proche de la barre et, donc mieux entendre ou tout simplement tendre les oreilles. En tout cas, l'absence de la sono dans une salle d'audience est toujours préjudiciable à tout le monde. Vivement qu'on y songe, car il y va de l'intérêt de tous.

* Les avocats en vedettes

Une vingtaine d'avocats a assuré la défense des accusés. N'eut été le fait qu'on est dans une salle d'audience, certains auraient été ovationnés par l'assistance, tant ils contredisaient texte à l'appui le parquet général. Certains ont même eu du plaisir à démontrer que des articles du Code pénal n'étaient plus d'actualité. La réplique ne s'est pas toujours fait attendre. Le parquet général parvient souvent aussi à prendre le contre-pied de la défense. Et parfois c'est la cour qui joue aux arbitres pour mettre fin à ces empoignades amicales.


07/03/2008
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