L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Fermeture des chambres de passe : Le Fou exige un référendum

Fermeture des chambres de passe

Le Fou exige un référendum

 

La croisade que mène en ce moment le maire Simon Compaoré est de salut public. C'est sans conteste un combat pour la santé morale et physique de ses administrés. Malheureusement, il se situe à la fin d'un long processus, car avant d'ordonner la fermeture des chambres de passe parce qu'elles seraient des lieux de dépravation, il faut d'abord étouffer dans les coeurs et dans les esprits, les mauvaises choses qui y naissent. En pays moaga, on pourrait dire que Simon a laissé le fantôme élire domicile avant de décider de le chasser. Ces mauvaises choses, ces mauvaises pensées, ces mauvais comportements ont pour origine le milieu ou, si l'on veut, l'environnement. Qu'est-ce qui est interdit, défendu? Qu'est-ce qui est sacré dans la société burkinabè d'aujourd'hui? C'est l'argent et ce qu'il permet d'être et de faire. Pour l'avoir, les hommes ne reculent devant rien. Le résultat de cette attitude, ce sont les détournements des déniers, la corruption, le mensonge, la concussion, voire le crime, s'il le faut, la fin justifiant les moyens.

L'existence des chambres de passe, leur fréquentation, sont avant tout une conséquence du délitement des valeurs fondatrices de notre société. Fermer aujourd'hui les chambres de passe, revient à couper la tête d'une hydre. Le problème est plus grand, il dépasse les compétences du seul maire et son conseil municipal. La lutte contre la prostitution demande un engagement entier de l'Etat et de tous.

Dans sa croisade contre les chambres de passe qui passeraient pour être les foyers de la prostitution, des endroits privilégiés de la transmission du VIH-SIDA et des MST, le maire Simon diabolise, stigmatise les propriétaires de ces maisons closes. L'argument qu'il avance, et qui ne peut prospérer, c'est que les parcelles où elles se dressent ont été à l'origine attribuées pour des usages d'habitation. Combien de maisons d'habitation à Ouagadougou ont été détournées de leur but initial et transformées en lieux de culte, en bars et bars-dancings, en commerces, sans être dans une zone commerciale? Simon Compaoré s'est longuement entretenu avec les propriétaires des chambres de passe qui seraient au nombre de trois cents (300) dans la capitale. Il semble ou feint d'oublier un acteur important dans cette histoire : l'utilisateur, celui qui n'a pas de résidence de passe et qui ne peut pas se payer une chambre dans un grand hôtel. Son avis n'a pas été requis dans cette affaire. Aussi préconisons-nous, pour une question d'une si grande importance, la tenue d'une consultation des citoyens de la ville, une sorte de référendum local. Le maire Simon comprendrait alors que si on l'encourage dans sa farouche détermination pour fermer les chambres de passe, si les Ouagavillois lui sont reconnaissants pour sa lutte pour arracher leurs âmes des flammes de l'enfer, ils ont des problèmes plus cruciaux et plus urgents qui les assaillent et qui ont pour noms le banditisme et la grande criminalité dans les rues de Ouagadougou, le taux intolérable du chômage, les infrastructures scolaires et sanitaires insuffisantes, les routes non goudronnées, le manque de transports publics performants, etc. Fermer les chambres de passe n'est pas une mesure suffisante pour lutter efficacement contre la prostitution et les autres maux qu'elle traîne avec elle, la drogue par exemple. Il serait plutôt plus sage d'obliger les exploitants de chambres de passe au respect strict d'un cahier des charges, notamment dans sa composante hygiène et sécurité. En vérité, personne ne peut déclarer un jour que la prostitution a été boutée hors de la capitale. Sitôt les chambres de passe fermées, on les retrouvera ailleurs dans les maisons abandonnées, sur les vieux chantiers, dans les classes, en plein air, dans des véhicules stationnés sur les bas-côtés, etc.

La lutte contre la prostitution ne doit pas être menée au pas de charge. Elle doit débuter par une concertation de tous les acteurs habités d'un même sentiment : l'intérêt général. La lutte contre la prostitution est avant tout un problème de l'Etat. C'est à lui que revient l'éducation des jeunes aux valeurs morales et éthiques fondatrices de la société burkinabè.

Si le maire ignore les avis des uns et des autres et persiste dans la voie qu'il a choisie pour extirper la prostitution de sa municipalité, il ne peut pas échapper à l'accusation selon laquelle ce combat est dirigé contre les pauvres citoyens. D'autres ajoutent qu'il a pris fait et cause pour les grands hôteliers, qu'il mène une lutte économique en faveur des hôteliers qui accusent les propriétaires de chambres de passe de concurrence déloyale. Pour les différentes raisons avancées, il convient en priorité de commander une étude sociologique sur le phénomène dans la ville de Ouagadougou. Après quoi, il avisera.

 

Le Fou

Le pays du 28 mars 2008



28/03/2008
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