La nécessité de s'opposer aux APE
Accords de partenariat économique
La nécessité de s'y opposer
S'élever contre les Accords de partenariat économique (APE), c'est faire montre de patriotisme économique, car il s'agit d'éviter qu'une fois encore, après les Programmes d'ajustement structurel (PAS) et la dévaluation du franc CFA..., on nous assassine à petit feu en nous enlevant toute possibilité de nous relever de la chute provoquée par l'esclavage et la colonisation. Telle est la conviction du Front contre l'application des APE, qui joint sa voix à celles qui se sont déjà exprimées à travers le monde le 27 septembre dernier.
Le 27 septembre 2007, cinquième anniversaire de la signature des APE, a été célébrée la Journée mondiale de mobilisation contre lesdits accords entre les ACP (Afrique Caraïbes Pacifique) et l'Union européenne. Ainsi plus de 80 mouvements sociaux, organisations paysannes, syndicats et ONG d'Afrique, des Caraïbes, du Pacifique et de l'Union européenne, se sont engagés à travers cette journée pour que :
- des mesures de libéralisation et ou d'autres mesures liées aux ACP ne soient pas imposées aux ACP ;
- l'Union européenne s'abstienne de faire pression pour obtenir l'application des accords dès le 1er janvier 2008 ;
- des alternatives non réciproques soient offertes aux ACP et qu'ils aient une assurance sur le fait qu'ils continueraient leurs exportations vers l'Europe pour ceux qui ne signeront pas les APE.
Le Burkina Faso, depuis que sont combattus à travers le monde ces accords de partenariat économique, donne l'impression de n'avoir pas encore perçu ce problème dans toute sa dimension. Nos organisations sociales sur place œuvrent du mieux qu'elles peuvent mais ne sont pas encore parvenues à expliquer aux populations les graves conséquences auxquelles nous serons confrontés si jamais ces accords étaient appliqués.
De ce fait, un certain nombre de démarches ont été menées par des jeunes qui se sont réellement sentis interpellés par la question. Des jeunes qui ont vu planer à travers les APE des Accords de libres échanges (ALE) catastrophiques à court et à long terme sur nos Etats.
De ces démarches est né le Front contre l'application des APE (FCA/APE). Ce front se veut un cadre de réflexion, un bastion d'actions telluriques dont le but est de tout faire pour empêcher l'application de ces accords, qui, en réalité, pour schématiser, ressemble au partenariat du cheval et du cavalier, puisqu'ils rendront les pays ACP manipulables à souhait par l'UE.
Pourquoi ?
L'Union européenne fait miroiter depuis les discussions autour des APE des appâts à la chair très attrayante pour certains. De nombreuses mesures d'accompagnement dont des sommes faramineuses sont proposées. Cela naturellement les empêche de voir avec plus de pragmatisme les dangers auxquels nous pouvons être confrontés (principalement en Afrique) si jamais ces accords étaient en application. Mais voyons. Quels inconvénients y a-t-il à les appliquer ? Pêle-mêle, les organisations qui vont contre en ont décelé plusieurs :
- pertes de recettes fiscales sur les importations (puisque plus de droits de douanes à prélever) ;
- une concurrence qui trucide les filières locales;
- aggravation des risques sociaux (désœuvrage général, exacerbation des conflits de tout genre et exode rural, criminalité...) ;
- impact terrible sur la souveraineté alimentaire...
On ne saurait limiter cette liste aux inconvénients précités, tellement il peut y en avoir. Mais retenons le dernier impact cité pour dire que pour le moins, si ces accords sont appliqués, nous assisterons à la disparition de nos produits locaux au profit des produits importés, génétiquement modifiés et subventionnés d'Europe.
Naturellement, nos pays risquent de se voir transformés en dépotoirs des pays européens, ce qui entraînerait, au pire, des situations comme celles des déchets toxiques d'Abidjan. Les pays les plus pauvres verraient s'estomper tout espoir de mise en œuvre d'un programme d'industrialisation et de valorisation de leur agriculture, de leur élevage. Dans le cas d'une destruction des filières agricoles, il y aura bien évidemment un risque de généralisation des OGM. La dépendance vis-à-vis de l'extérieur irait crescendo et les ressources de nos Etats baisseraient inexorablement. Nos ensembles régionaux, qui sont censés grandir par ces accords, pourraient même s'effriter à long terme.
De la nécessité de nous mobiliser
A toute organisation de la société civile, à toute organisations paysannes, à tout citoyen tenant à la souveraineté de ce pays, à toute la jeunesse burkinabé, il n'est ici nullement question de bord politique. Il s'agit de patriotisme économique, il s'agit d'éviter qu'une fois encore, après les Programmes d'ajustement structurel (PAS), la dévaluation du franc CFA..., on nous assassine à petit feu en nous enlevant toute possibilité de nous relever de la chute provoquée par l'esclavage et la colonisation. L'Union Européenne compte dans ces accords avoir comme interlocuteurs les sous-ensembles régionaux tels la CMAC, la CEDEAO... encore en maturation. Imaginons dans le cas de la CEDEAO un Pays en voie de développement (PVD), comme le Nigeria, et un PMA (Pays les moins avancés), comme le Burkina Faso, soumis au mêmes tarifs extérieurs. Cela n'est autre chose qu'un processus de lente asphyxie. Ce seul exemple pour dire que les difficultés potentielles ne manquent pas. C'est pour cette raison que nous devons nous mobiliser et ensemble crier notre refus. Tout d'abord auprès de nos dirigeants et par la même occasion détourner l'esprit de l'Union Européenne de cette autre forme d'esclavage.
Ayons à l'esprit que sur les 79 pays ACP, qui comptent 717 millions d'habitants, 48 sont en Afrique (soit 94%), dont 40 Pays les moins avancés (PMA) et plus 46% d'entre eux survivent avec moins de 1$ par jour. Faudrait-il laisser malmener autant de personnes qui ont toujours souffert de l'interventionnisme européen ? Nous disons non ! Bien évidemment. C'est la raison pour laquelle nous joignons notre voix aux organisations qui ont manifesté le jeudi dernier ici, en France, et un peu partout dans le monde.
L'Union européenne a réduit les objectifs d'éradication de la pauvreté et de développement durable de l'Accord de Cotonou. Elle ne cherche alors que ses propres intérêts en boostant le déclin économique et la fragilité politique de la plupart des pays ACP. Nous sommes malheureusement là, témoins contemporains de ce jeu cupide et malsain dont de nombreuses générations pourraient souffrir. C'est là que l'histoire interviendra pour nous rappeler que nous avons assisté passivement à l'assassinat et à l'enterrement de tout espoir de voir notre économie se consolider un jour. La nécessité de signer ces accords n'est en rien substantielle pour les ACP. Les négociations, pour que chacun profite des retombées des APE, si telle est vraiment l'intention de la partie européenne, ont besoin de plus de temps et de consensus. C'est fort de ce constat que notre front s'insurge contre l'application de tels accords. Il y va de notre souveraineté, de la préservation de la possibilité de choisir nos options économiques, en un mot, de notre dignité. Nous pensons alors qu'aucun pays ne doit mettre en application ces accords (Nous disons bien «en application» car nous soupçonnons nos Etats d'avoir ratifié lesdits accords), qu'aucun chef d'Etat ne doit sacrifier son peuple. Comme une épée de Damoclès, ces «Accords de paupérisation efficace» (APE) planent sur nos têtes. Nos lanternes n'ont été éclairées que tardivement sur ces négociations, qui ont été menées dans les ténèbres loin de ceux qui devront les subir, c'est-à-dire nous. Mais ne dit-on pas que mieux vaut tard que jamais? Nous avons encore trois mois pour jouer notre survie!
Pour la Coordination
David Sanou
Tél. : 70 44 73 33
E-mail: fcaape@hotmail.fr
L’Observateur Paalga du 17 octobre 2007
A découvrir aussi
- Législatives 2007: On demande de “vrais” partis
- Méningite : Une mafia s'enrichit du malheur des Burkinabè
- DE TOI, JAILLIRA MON AMOUR
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 1021 autres membres