Le procès de la Françafrique ?
Mal gouvernance
Le procès de la Françafrique ?
Pour plus d'un observateur, le retrait de Jacques Chirac de la scène politique internationale rime bien avec la fin de la Françafrique. Et depuis l'arrivée triomphale de Nicolas Sarkozy à l'Elysée un certain 16 mai, en effet, il n'est pas interdit de penser que nombre de rois nègres, jadis sous l'aile protectrice de la France-mère, pourraient se faire des soucis et pour leur couronne, et pour leur avenir proche.
En tout cas, le ton semble donné avec la prise de distance récente du nouveau locataire du Palais de l'Elysée avec la gestion chiraquienne de l'affaire Borel, dans laquelle le pouvoir français de l'époque aurait manœuvré contre la justice française pour protéger l'homme fort de Djibouti.
La suite ne s'est pas fait attendre. Et voici une autre bombe à fragmentations, jetée dans les palais africains par la justice française, qui a accepté, après une plainte des associations "Sherpa", "Survie" et de la Fédération des Congolais de la diaspora (Fcd), d'ouvrir une enquête préliminaire contre les présidents gabonais Omar Bongo Ondimba et congolais Dénis Sassou N'Guesso pour détournement de biens publics.
S'il est reproché au légendaire gendre de Sassou N'Guesso, Bongo, et à sa famille d'avoir la propriété d'un hôtel particulier et de quatre appartements dans le XVIe arrondissement de Paris, son beau-père, lui, devrait répondre des accusations de posséder un appartement à Paris ; un hôtel particulier de 700 m2 dans les Yvelines, estimé entre 5 et 9 milliards de nos francs ; plusieurs biens immobiliers en région parisienne, dont un luxueux appartement de 550 m2 à Courbevoie (Hauts-de-Seine).
A en croire, d'ailleurs, le rapport du Comité catholique contre la faim et pour le développement, ces possessions des deux accusés de luxe ne constitueraient que la partie visible de l'iceberg.
Depuis l'ouverture de l'enquête préliminaire le 18 juin par le Parquet de Paris, le sommeil du juste n'est plus la chose la mieux partagée dans les palais africains, où la menace de l'épée de Damoclès se fait de plus en plus sentir.
Pour la France, longtemps suspectée plus à raison qu'à tort de complaisance envers les dictateurs et prédateurs africains, c'est l'occasion ou jamais de ramener sur terre ceux d'entre eux qui rêvaient d'une immunité éternelle; quoiqu'ils fassent, hélas, des pieds et des mains, et parfois par la force du canon pour s'accrocher au pouvoir.
Questions à réponses multiples :
- quel salaire un président de l'Afrique de toutes les calamités perçoit-il pour avoir un patrimoine aussi faramineux ?
- Et pour reprendre Benjamin Mutsila, président de la FCD, peut-on imaginer un seul instant qu'un enfant de dix-huit ans, qui n'a pas de revenus, puisse acquérir un appartement dans un quartier comme Neuilly dans le XVe arrondissement de Paris ?
Même si les plaintes portées contre Bongo et Sassou N'Guesso, qui menacent de mouiller d'autres chefs d'Etat africains, n'ont pas de chance d'aboutir, elles auront au moins eu le mérite de rappeler à notre mauvais souvenir les frasques de ceux qui nous gouvernent et de nous faire rêver qu'enfin la page des dictateurs est en train d'être tournée.
«Billets craquants» in L’Observateur Paalga du 25 juin 2007
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