Manifestations contre la vie chère
Manifestations contre la vie chère
La priorité doit être à la préservation des acquis et à la sauvegarde de la paix sociale
Les manifestations contre la vie chère dans les villes de Bobo-Dioulasso, de Banfora et de Ouahigouya sont désormais un mauvais souvenir. Mais elles ne sont pas sans susciter la réflexion à tous les niveaux. Ainsi, les réactions sur la question, somme toute préoccupante, alimentent et alimenteront certainement pour longtemps encore les débats.
C'est dans ce registre qu'il faut mettre l'écrit suivant du député Toussaint Abel Coulibaly. Pour lui, la préservation des acquis et la sauvegarde de la paix sociale doivent être la priorité dans cette situation.
Les 20 et 21 février 2008, les villes de Bobo-Dioulasso, de Banfora et de Ouahigouya ont connu des manifestations de rues organisées contre la vie chère. Il s'en est suivi des dégâts
dont les plus importants sont survenus à Bobo-Dioulasso.
Les faits me préoccupent au plus haut point, parce qu'ils dénotent une divergence de vues entre les populations laborieuses, que je représente, et moi-même sur certaines questions de la vie.
En effet, en tant qu'élu parlementaire, représentant de la nation, agissant pour le bien et l'intérêt général, mon souhait n'est pas que ceux que je représente en soient réduits à détruire leur cadre de vie et leurs moyens d'existence acquis au prix des efforts de plusieurs générations, dont l'actuelle, compromettant ainsi l'avenir de celles futures.
A bien analyser les faits, une insuffisance d'écoute et de dialogue a existé entre les décideurs et les administrés, et c'est en cela que je me sens concerné pour n'avoir pas pris toute la mesure des préoccupations de ces populations.
C'est vrai que la vie est chère, marquée en tant que telle par une augmentation des prix des céréales, des produits de première nécessité, de l'eau, de l'électricité, des hydrocarbures. Mais, en outre, les manifestants de Bobo-Dioulasso ont avancé entre autres griefs l'augmentation des patentes et des taxes.
Concernant la cherté de la vie, et en tant que citoyen confronté aux mêmes difficultés du quotidien, je comprends parfaitement l'état d'âme de ceux qui, en toute sincérité et dans un élan de désespoir, ont manifesté leurs préoccupations, voire leur mécontentement.
En revanche, pour ce qui concerne les taxes, je puis en tant que membre du Parlement burkinabé, institution qui autorise le gouvernement à percevoir l'impôt, assurer les populations, qu'aucune nouvelle taxe n'a été instituée au cours des 12 mois écoulés.
Même si tel était le cas, rien ne justifierait la destruction des biens, qu'il faudra reconstituer au détriment de nouvelles réalisations. Des voies légales de revendications existent. Les cadres de concertation gouvernement/secteur privé et gouvernement/syndicats auraient certainement apporté plus de satisfactions et de sérénité dans la prise en compte des revendications.
Certaines hausses ne se justifient nullement
Certaines causes de la cherté de la vie sont liées à un contexte de surenchérissement des produits importés. A titre d'exemple, le mercredi 2 janvier dernier, le prix du pétrole à franchi, à New York, le seuil symbolique de 100 dollars le baril. Pour un pays africain non producteur de pétrole, comme le Burkina Faso, cela se répercute forcément sur les prix.
Le système actuel d'approvisionnement de notre pays en énergie électrique n'est pas non plus de nature à favoriser la réduction des coûts de production. C'est pour cela qu'il faut
saluer les interconnexions envisagées par le gouvernement.
Cependant, certaines hausses ne se justifient nullement, et c'est le rôle du gouvernement de trouver les voies et moyens pour ramener les prix à leurs justes proportions. A titre
d'exemple, certains commerçants se sont vus fondés à répercuter sur les consommateurs la TVA, que les services des impôts ont décidé d'appliquer aux redevables depuis un certain temps.
C'est d'ailleurs ce que le ministre de l'Economie et des Finances, Jean-Baptiste Compaoré, a ressorti au cours de la rencontre tenue avec les opérateurs économiques de la ville de Sya, le jeudi 21 février 2008, en disant que rien n'a été ajouté dans la loi pour pénaliser les opérateurs et les commerçants, et que l'on a juste décidé de l'appliquer à tout le monde.
L'Etat a un grand rôle à jouer dans la maîtrise des prix et cela à travers son rôle de régulateur de la vie socio-économique.
Le paradoxe, c'est que les manifestations contre la vie chère surviennent à un moment où des décisions courageuses sont prises au niveau le plus élevé de l'exécutif pour assainir la gestion des affaires publiques. Ne perdons pas de vue que les résultats de telles actions ne sont pas immédiatement perceptibles.
"Nous ne devons pas peindre tout en rose ou en noir"
Loin d'entrer dans des querelles mesquines ou d'incriminer une personne de façon singulière, je demeure convaincu que le meilleur service que l'on puisse rendre aux gouvernants consiste à les informer sur les préoccupations réelles des populations. C'est à cette condition que nous pourrons faire l'économie des événements malheureux que nous venons de vivre et nous mettre à la hauteur des responsabilités qui sont les nôtres. Nous ne devons surtout pas peindre tout en rose ou en noir, au risque d'être taxé à juste titre d'irresponsables.
Tout en comprenant les difficultés auxquelles les populations sont confrontées, j'estime que nous ne pourrons préserver l'exercice du droit de manifestation (reconnu par nos textes)
des récupérations et utilisations abusives qu'en l'exerçant dans le respect des textes et de l'esprit citoyen ; c'est à ce titre que l'Etat de droit sera une réalité. La faute présumée de l'autre ne doit pas justifier des excès que nous regretterons les moments de colère passés.
En tant que parlementaire, mon rôle est de comprendre ce que veulent les populations en les consultant afin de rendre les lois plus conformes à leurs aspirations, mais aussi, de veiller à ce qu'elles connaissent les limites de leurs droits et obligations envers les institutions républicaines.
En cela, il nous revient à tous, membres de la société civile, leaders d'opinion, responsables politiques, de faire une analyse objective des faits et des circonstances des événements, en toute humilité, et de tirer les leçons qui s'imposent pour redonner la confiance aux populations.
La paix sociale n'a pas de prix. Donnons-nous la main pour nous engager sur le sentier du développement.
Député Toussaint Abel Coulibaly
4e vice-président de l'Assemblée nationale
L'Observateur Paalga du 26 février 2008
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