Nomadisme politique : Halte au brigandage !
NOMADISME POLITIQUE AU Burkina
Halte au brigandage !
La campagne électorale est la période précédant une élection durant laquelle les candidats et leur parti "font campagne", c'est-à-dire font leur promotion dans le but de récolter le plus grand nombre de voix possible. Après, ils font ce qu’ils veulent. A la veille des législatives de 2007,on assiste à une valse d’étiquettes des hommes politiques.
Ils changent de partis comme ils changent de chemises. Tant pis pour les convictions politiques et les professions de foi. Comme des oiseaux migrateurs, ces hommes politiques émigrent sous des cieux plus cléments, dans les verts pâturages où leurs intérêts personnels seraient le mieux protégés. Leurs intérêts et non ceux des électeurs.
Le nomadisme politique est devenu, pour certains, un mode opératoire pour prendre en otage les voix des électeurs, pour saborder des partis politiques qui les ont pourtant accueillis à bras ouverts. La transhumance politique se banalise au nom de la liberté que donne la Constitution à tout citoyen de choisir ou de créer librement son cadre d’expression politique.
Force est de constater cependant que les incessants va-et-vient des acteurs ne sont pas faits pour inspirer confiance. En 15 ans de processus de démocratisation, l’image de l’homme politique n’a jamais été autant écornée. L’homme politique a perdu tout crédit et il est dans son propre intérêt que cesse cette forme de brigandage des voix des électeurs.
Cette perte de crédit rejaillit également sur l’Etat et ses institutions animées par ces politiciens retors. Quel crédit accorder désormais à un tel politicien quand il signe un accord au nom de l’Etat ou de son institution ? L’électeur, après avoir donné sa voix à un candidat, n’a plus son mot à dire.
Sa voix est pour ainsi dire prise en otage par l’élu, qui, comme un vulgaire escroc ou brigand, va le monnayer auprès d’autres partis politiques. Le citoyen assiste médusé à ce triste spectacle qui a fini de transformer la politique en une sombre officine de marchandages de postes au détriment des débats d’idées et des débats contradictoires.
Cette vague de transhumants politiques met à nu les incohérences de la dictature des partis politiques. Ces formations politiques reconnues par la Constitution comme les animateurs de la vie politique, confient leurs couleurs, leurs moyens et leur programme aux candidats pour conquérir l’électorat.
Il est donc légitime qu’il s’attende en retour à ce que l’élu qui s’en va, laisse son siège vacant aux fins qu’il soit remis en jeu. Cependant, les partis gagneraient aussi à améliorer leur gestion interne, à la rendre plus démocratique et transparente. Car les démissions sont quelquefois, le résultat de tentatives d’étouffements de certaines personnes.
Véritablement, il y a abus de confiance, voire de la trahison de la part des politiciens qui se livrent à de tels comportements. L'élu est, jusqu’à preuve du contraire, un représentant du peuple. Et le mandat que lui confère l’électeur en lui donnant sa voix est une marque de confiance et un engagement à le représenter dans les instances démocratiques. Les qualités premières d’un homme politique devraient donc être l’intégrité morale et le respect de la parole donnée.
Démissionner d’un parti pour un autre avec mandat électif, n’est rien d’autre que de l’escroquerie. L’honnêteté intellectuelle aurait commandé que l’homme politique qui démissionne remît son mandat. Apparemment, ils n’en sont pas capables, dans leur grande majorité. Il faut donc moraliser la vie politique.
Une loi sur le nomadisme est de ce fait nécessaire. Elle ne fait pas l’affaire des gourous, comme on dit, qui ont déjà rejeté toute idée de légiférer sur la question. Pour l’adoucir, il faudrait également trancher la question des candidatures indépendantes. Car parmi les démissionnaires, certains, pour une raison ou pour une autre, se trouvent à l’étroit dans leur famille politique. La candidature indépendante pourrait être une solution alternative qui permet à l’homme politique de ne pas trahir ses convictions.
Il faut sauver notre démocratie d’un naufrage annoncé. Si rien n’est fait, le risque est grand de voir des votes-sanction ou, plus grave encore, la désertion des bureaux de vote par les citoyens. De plus en plus , on assiste à une prise de conscience citoyenne. Avec la confection des listes de candidatures pour les prochaines législatives, on a assisté à des scènes de défiance de la base.
Et à ce rythme, pourquoi ne pas intenter des procès aux transhumants pour détournement de voix, abus de confiance ou tout simplement pour trahison ? Ce serait légitime pour les plaignants, de réclamer que leurs suffrages, si chèrement donnés, ne soient pas pris en otage ou tout simplement bradés.
Le Pays du 12 avril 2007
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