Un silence qui sent le soufre (Commission électorale zimbabwéenne)
Commission électorale zimbabwéenne
Un silence qui sent le soufre
Près de deux semaines après la tenue des élections générales au Zimbabwe, les résultats officiels de la présidentielle, le scrutin phare, se font toujours attendre. Une attente qui fait grandir l’impatience face à une procédure qui s’éternise et qui fait surtout craindre pour la paix sociale dans un pays divisé entre les pro-Mugabe et les militants et sympathisants de l’opposition. Depuis, la tension monte entre les deux camps.
Avec ce grand retard dans la publication des résultats, on assiste à une situation inédite sous nos tristes tropiques en matière électorale. En effet, généralement, c’est l’opposition qui conteste les résultats et crie à la fraude. Mais voilà qu’à Harare, c’est le parti au pouvoir qui hurle aux bidonnages des résultats tout en exigeant le recomptage des voix. De l’autre côté, l’opposition, emmenée par Morgan Tsvangirai, réclame la publication, sans délai, des résultats. Mettant le droit de son côté, elle a même engagé une procédure judiciaire pour contraindre la commission électorale à donner les résultats du scrutin. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que la justice semble abonder dans ce sens, puisqu’elle a reconnu sa compétence et le caractère urgent de la requête de l’opposition.
C’est aussi le signe que nos commissions électorales, bien qu’affublées souvent de la mention «indépendante», sont en réalité assujetties au parti au pouvoir. Si non comment comprendre que la commission se refuse jusque-là à publier les données qu’elle a en sa possession alors qu'on sait qu’une telle publication permettra au moins de crever l’abcès zimbabwéenne ? Ainsi, chacun sortira du bois et s’affichera soit comme pyromane qui veut brûler le pays, soit comme un républicain qui s’incline galamment devant le verdict des urnes dans l’intérêt supérieur de
Mais la commission électorale, parce qu’elle traîne à publier les données qui vont départager Tsvangirai et Mugabe, crée un retard qui nous donne l'impression qu'on est en train de passer les résultats au Moulinex en faveur bien sûr de Bob. Pire, elle observe un silence coupable qui ne peut, dans le contexte actuel, que sentir le soufre.
En maintenant les électeurs dans une insoutenable expectative, la commission, par action ou par omission, est en train de conduire le pays dans le chaos. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que par son attitude, elle est en train de se discréditer, car elle aura bien du mal à convaincre de sa bonne foi et à montrer qu'elle n'a pas bidouillé les résultats des scrutins. Et c'est sa faute si elle se trouve aujourd'hui entre le marteau et l'enclume, pressée comme elle est par l'opposition et le pouvoir. La situation est explosive, c'est peu dire, et il urge que l'Union africaine, qui a été prompte à intervenir à Anjouan, se mette en ordre de bataille pour éviter au Zimbabwe les affres qu'a connues le Kenya à l'issue de sa dernière élection présidentielle. A la lumière de ce qui s'est passé au Kenya, plus que jamais, un devoir d'ingérence s'impose à l'Union africaine. Elle doit prendre ses responsabilités dès aujourd'hui, car on acceptera pas que demain elle dise qu'elle ne savait pas.
San Evariste Barro
L’Observateur Paalga du 10 avril 2008
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