L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Braquage sur la route de Bobo 45 longues minutes de calvaire

Braquage sur la route de Bobo 45 longues minutes de calvaire

 

Le mardi 19 février 2008, les coupeurs de route se sont signalés sur la route de Bobo Dioulasso, entre Houndé et Pa dans le village de Herédougou.

 

         

      Les braqueurs viennent de se sauver, les voyageurs peuvent enfin respirer

Quand nous embarquons dans le car TCV ce mardi à 15 heures, à Bobo-Dioulasso pour Ouagadougou, nous étions loin d'imaginer que nous avions rendez vous avec les coupeurs de route. TCV semble être à l'heure actuelle la meilleure des compagnies de transport, opérant sur le trajet Ouaga-Bobo-Ouaga. Néanmoins, notre car du jour, contrairement à celui de la veille, avait la climatisation défectueuse. Ce petit désagrément incommodait quelque peu et les passagers, qui avaient payé aussi pour le confort, commençaient à s'en plaindre. Ils ne savaient pas que le plus dur était à venir.

Comme dans un mauvais rêve !

On a beau savoir que le phénomène existe, on y pense que rarement, pour ne pas dire jamais, quand on emprunte la route. Et surtout pas en pleine journée. Nous avons quitté Bobo Dioulasso à 15 heures pétantes et à cette heure de la journée on se convainc que les imbéciles n'oseront pas. Eh bien ! à peine une heure de route et nous voilà nez à nez avec les coupeurs de route. Au sortir d'un petit virage, voilà devant nous un petit attroupement, deux premiers cars de transport en commun étaient déjà tombés dans le guet-apens. Quand nous apercevons les nombreux passagers étalés sur la chaussée, nous pensons d'abord à un accident et puis voici les malfrats encagoulés de part et d'autre de la route. "Coupeurs de routes " ! chuchotent quelques passagers du car qui sont encore en pleine possession de toutes leurs facultés. Le reste va aller très vite, le convoyeur qui était assis à côté du chauffeur se faufile rapidement dans l'allée et s'en va se débarrasser de sa blouse à l'arrière du car. Il nous expliquera plus tard qu'en cas d'attaque, les coupeurs n'hésitent pas à liquider les convoyeurs. Alors quand survient une attaque le premier réflexe est de se débarrasser de la blouse encombrante. Comme le feraient aussi les forces de l'ordre de leur uniforme. En ces moments capitaux, les réflexes de survie sont instinctifs. Alors que le convoyeur s'en va se débarrasser de sa blouse, certains passagers téméraires songent à cacher ce qui peut l'être en quelques endroits du car. Tout ça se passe très vite. Le chauffeur à son tour, à peine le car immobilisé, s'en presse de se mélanger aux passagers et c'est alors que les malfrats ordonnent de descendre. La sortie est pénible.

La peur fait faire des choses inimaginables à l'individu. Comme des automates, les passagers, à peine hors du car, s'affalent sur le bas côté de la route. Un des malfrats tire des coups en l'air et le bruit que fait la kalachnikov, finit de terroriser même les plus courageux. Etait-ce la crainte de mourir ? En tout cas, on n'avait pas l'impression qu'il s'agissait d'un peuple qui a traversé le Conseil national de la révolution avec les formations au maniement des armes. C'est vrai que cette période est déjà trop loin derrière.

Cet après-midi-là, les malfrats qui nous ont braqués n'étaient pas vraiment des Rambo. Quatre individus au physique quelconque, dont au moins deux étaient armés de Kalachnikov et un troisième, qui semblait être le chef de la bande, brandissait une arme relativement plate, pliable et qui avait un boîtier rond qui semblait être le chargeur de l'arme. Cette arme était de couleur vert olive. En dehors de celui qui brandissait l'arme plate, les autres qui avaient les kalachnikov, par la manière de tenir leur arme, donnaient l'impression de ne pas être très familiers aux fusils. Ils ne s'en sont pas servis, même pour tirer en l'air. Leur rôle semblait être essentiellement de dépouiller les passagers de leur argent. Un des malfrats, dans un français à l'accent togolais ou béninois répétait inlassablement "donnez l'argent ! donnez l'argent vite" en fouillant lui-même certains passagers, sans aller jusqu'à les maltraiter. Pendant environ 45 minutes et de façon minutieuse, ils vont fouiller les passagers et les cars. Et puis un moment, on a entendu un d'entre eux dire qu'ils n'ont pas trouvé l'argent. Alors, ils sont encore rentrés dans le car et ont recommencé à fouiller pour descendre un instant après avec des sacs qu'ils ont emportés avec eux. En tout cas, ils ont pris leur temps pour faire ce qu'ils voulaient et se sont retirés sans précipitation dans les fourrés les plus proches. Avant de partir, ils ont ordonné aux passagers de rejoindre les cars.

Il s'agissait des gens sûrs d'eux qui ont opéré. Visiblement ils n'étaient pas trop intéressés par les portables. Ils n'auraient emporté que le portable d'une Française. Il y avait effectivement dans le car, trois Français qui ont été délestés des euros qu'ils avaient sur eux. Les malfrats auraient emporté environ 500 euros uniquement dans le car TCV. S'ils ont retrouvé le butin caché, ils ont dû s'en tirer avec un joli magot.

Pendant tout ce temps qu'a duré l'attaque et alors que nous étions seulement à quatre kilomètres de Houndé, nous avions espéré que les forces de l'ordre surgiraient et mettraient en déroute ces vils personnages ne serait-ce que pour les Occidentaux qui étaient avec nous et pour montrer quand même que l'autorité de l'Etat règne partout sur le territoire national. Personne ne viendra perturber la besogne des malfrats. C'est quand ils nous ont libérés que nous verrons arriver une escouade de gendarmes, arme au point, l'air de faire exactement comme l'ex-boxeur Salam Ouédraogo qui, mis chao par un Américain se réveillera des heures après en criant " où est le mercain !!! où le mercain là ? Qu'il vient je va le mettre chao !!!! ".
Cette malheureuse expérience, nous a laissé la désagréable impression que dans cette lutte contre les braqueurs, nos braves forces de l'ordre sont incompétentes. Il ne s'agit pour nous d'accabler personne. Mais il faut peut-être que la lutte s'organise autrement et plus scientifiquement. Il n'est pas possible que le phénomène sévisse depuis si longtemps et sur les mêmes axes, sans que des plans de ripostes n'aient été imaginés et prêts à être mis en œuvre lorsqu'un braquage se produit. Le plus désarmant c'est qu'il n'y a même pas un numéro spécial, à mémorisation facile et affichable sur le long des tronçons, auquel, on pourrait facilement alerter les forces de sécurité lorsque se produisent les attaques. Les numéros ordinaires d'alerte ne sont pas faciles d'accès. Ils peuvent sonner longtemps avant qu'on ne décroche. Alors que dans ces situations c'est une question de seconde. C'est beaucoup plus ce sentiment d'impuissance des forces de l'ordre devant un si grave fléau, qui est affligeant. Il y a plus d'une décennie maintenant que le phénomène sévit et à chaque fois, les forces de l'ordre arrivent toujours après que le forfait a été accompli et que les malfrats se sont tranquillement retirés. C'est vraiment désespérant. Ouaga-Bobo, ce n'est pas aussi distant que ça. Moins de 400 kilomètres que nous sommes incapables de sécuriser. Finalement ce ne sont pas les malfrats qui sont forts, ce sont nos forces de l'ordre qui ne sont pas à la hauteur. C'est pourquoi beaucoup de passagers n'ont pas jugé utile de se soumettre à l'exercice de déposition à la gendarmerie de Boromo. Est-ce qu'on peut leur donner vraiment tort ?

Newton Ahmed BARRY

L'Evénement du 25 février 2008



09/03/2008
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