L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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En direct de Kosyam : Pouvait mieux faire

En direct de Kosyam

Pouvait mieux faire 

 

Quelques jours avant le jeudi 6 septembre 2007, quand la « chaîne du plaisir partagé » a annoncé dans son programme qu’elle rencontrerait le chef de l’Etat, Blaise Compaoré, pour un entretien à 20 heures, ils étaient nombreux, les Burkinabè qui ne tenaient  pour rien au monde à rater ce grand rendez-vous. Ce n’est pas tous les jours en effet que le tombeur de Thomas Sankara daigne s’exercer à ce jeu de questions-réponses, une heure durant devant la presse nationale et internationale. Sauf à certaines occasions rarissimes comme lors de la crise ivoirienne ou du dialogue intertogolais pour lequel il a réussi à réunir à la même table les différents protagonistes avec les perspectives heureuses qui se profilent à l’horizon.

C’est pour tout cela que ce jeudi 6 septembre, Blaise était attendu par tous, même si pour nombre de gens (ses adversaires politiques surtout)  rien de bien nouveau n’était à augurer de ce face-à-face avec la presse.  Hélas, on ne peut pas dire que ces pessimistes n’ont pas vu juste.

C’est un Blaise Compaoré moulé dans un costume sombre, qui lui va comme un gant, qui a reçu trois de nos confrères, à savoir Pascal Thiombiano de la Télévision, Alpha Barry de RFI et Rémy Dandjinou de Canal 3.

Le cadre était superbement meublé avec ses deux félins en postiche, qui semblaient veiller sur le maître des lieux ou tenir en respect les trois questionneurs. Pour qui connaît sa passion pour les bêtes fauves, quoi d’étonnant ! Voilà pourquoi devant lui également, trônait un guéridon où transparaît assez clairement la silhouette d’un aigle en position d’attaque.

Quoi qu’on dise, l’homme a été militaire avant de devenir ce qu’il est aujourd’hui et c’est un réflexe qu’il a sûrement gardé pour rester en éveil.

Dans son fauteuil imitation Louis XVI, l’enfant de Ziniaré, revenu de ses vacances helléniques, avait la mine resplendissante. Mieux, c’était à son nouveau palais de Kosyam à Ouaga 2000. Quand Pascal Thiombiano a campé le décor avant de dire : « Bonsoir, monsieur le président », celui-ci lui a calmement rendu la politesse comme d’ailleurs à son habitude. Passons sur la première question qui avait trait au palais de Kosyam et qui est digne d’un président de la République. Cette bâtisse a été conçue pour défier le temps, mais depuis la fin de sa construction, on n’a aucunement pipé le moindre mot sur son coût ; ne serait-ce que pour faire taire les mauvaises langues, qui parlent de sommes pharaoniques et qui estiment que la Cour des comptes devrait y faire un tour comme elle l’a fait  à la mairie de Ouagadougou.

Le 15 octobre 2007, cela fera vingt ans que Blaise exerce le pouvoir. Comment se sent-il à l’approche de cet événement que ses partisans comptent fêter en grande pompe ? A cette question du présentateur vedette du journal télévisé, Blaise n’a pas pris beaucoup de détours pour répondre. Selon lui, il est en pleine forme et bien déterminé à œuvrer pour le bien-être de la population en faisant avancer le pays. Mais au fil des débats, c’est un Blaise Compaoré pas toujours sûr de lui qui nous est apparu. Sur beaucoup de questions de grande importance, il est resté dans le vague. A la question par exemple de savoir si la médiatisation de son frère François est un signal fort pour sa succession, il a préféré répondre par la raillerie. Quid des routes burkinabè et d’autres infrastructures qui ne tiennent pas longtemps ? Il a banalisé la question en faisant une comparaison avec les Etats-Unis, où selon lui également, ce genre  d’infrastructures connaissent des détériorations précoces. On a eu l’impression qu’il tenait vaille que vaille à protéger ses ministres. Le président s’est même laissé aller au même badinage quand on lui a posé la question de l’opportunité de ce retour au village effectué par certains de ses ministres pour  solliciter l’onction de leurs parents et ancêtres. Ayant la possibilité de se représenter à l’élection de 2010 après les échéances en cours, il pense qu’il est trop tôt pour en parler et ne songe, dit-il, qu’au présent.

C’est connu, les chefs n’aiment pas entendre parler de succession  et surtout pas de dauphin quand ils sont encore aux affaires. Sur ce point précis, on a eu droit à une réponse évasive et il ne fallait vraiment pas s’attendre non plus à grand-chose.

Bref, il nous a été donné de voir un Blaise parfois crispé, souvent hésitant mais toujours bottant en touche comme l’avait dit le politologue Luc Marius Ibriga, qu’un journaliste de la TNB a interrogé à la fin de l’entretien. Même quand parfois il s’est risqué sur le terrain de l’humour, ce n’était pas toujours bien à propos. Au total, après une heure d’entretien, on est resté sur notre faim, puisque dans l’élévation des idées, on n’a pas beaucoup appris. Alors, on peut s’interroger sur l’opportunité d’un tel rendez-vous.

Blaise, on le sait, a d’énormes qualités de chef d’Etat sauf qu’il n’a pas la langue dorée et le bagou du parfait démagogue au sens noble du terme. Mais à l’expérience, il avait pris du galon et pour cette prestation, s’il y avait un jugement définitif à donner, ce serait cette appréciation bien connue des pédagogues : peut mieux faire.

 

La Rédaction

L’Observateur Paalga du 10 septembre 2007



10/09/2007
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