Entre inquiétudes et incertitudes
Investiture d’Hugo Chavez
Entre inquiétudes et incertitudes
«Je jure sur la merveilleuse Constitution, sur le Christ, le plus grand socialiste de l'histoire. Je ne laisserai pas reposer mes bras ni mon âme, je consacrerai ma vie et mes nuits à la construction du socialisme vénézuélien. Patrie, socialisme ou mort».
Hugo Chavez, le commandante du Venezuela, a ainsi prêté serment hier 10 janvier 2007 pour un nouveau mandat de six ans. Il avait remporté face à Manuel Rosales l’élection présidentielle du 3 décembre dernier avec 63% des suffrages. Pendant six ans, il aura entre ses mains la destinée de ce grand pays pétrolier. Mais déjà, sa politique économique et sociale suscite des inquiétudes au plan interne et externe.
Avec ce troisième mandat du fils spirituel de Fidèle Castro, le Venezuela va, plus que jamais, affirmer son adhésion totale au socialisme. N’a-t-il pas martelé lundi dernier lors de l’installation du nouveau gouvernement que «Nous sommes à un moment existentiel de la vie vénézuélienne. Nous avançons vers le socialisme, et rien ni personne ne pourra l’empêcher. Nous allons vers la République socialiste du Venezuela. Nous allons demander des pouvoirs spéciaux pour un ensemble de lois révolutionnaires» ?
C’est donc un nouveau socialisme d’Etat que le maître de Caracas entend traduire concrètement sur le terrain. La réussite d’un tel basculement passe nécessairement par la réalisation de nombreuses réformes.
C’est ainsi que dans le secteur de l’économie, Caracas a déjà annoncé la renationalisation de toutes les entreprises privatisées. Les plus en vue étant la société de télécommunications, CANTV, celle d’Electricidad, la compagnie d’électricité et les sociétés de la chaîne d’exploitation et de distribution des ressources pétrolières. Dans toutes ces entreprises, l’Etat vénézuélien va s’arroger, dans un premier temps, la majorité absolue des actions.
Côté politique, des modifications constitutionnelles sont en chantier, dont la plus importante est celle qui fera sauter le verrou qui limitait jusque-là le nombre de mandats présidentiels. Ce tripatouillage de la loi fondamentale va permettre à Chavez de se représenter autant de fois qu’il le veut à la magistrature suprême.
Cette marche vers un socialisme pure et dure ne peut se faire sans dérives ni entraves. Cela suppose qu’il va falloir lever tous les obstacles qui se poseront en travers du chemin et mettre au pas tous ceux qui ne voudront pas suivre le «messie» Chavez. Et ce n’est pas la Radio Caracas télévision (RCTV), proche de l’opposition, qui dira le contraire, elle qui verra son autorisation d’émettre retirée par le gouvernement.
En procédant de la sorte, le commandante se met à dos, et c’est normal, toute son opposition politique dont le chef de file, Manuel Rosales, a annoncé clairement que «nous n'allons pas permettre que le gouvernement se mette en route vers un système marxiste communiste».
Chavez a aussi réussi à s’aliéner le soutien de la hiérarchie catholique. Alors que cette dernière souhaitait le rencontrer pour en savoir davantage sur le «socialisme du 21e siècle» qu’il prône, il a simplement recommandé aux prélats la lecture des écrits de Lénine, de Max et de la Bible; déjà que l’Eglise n’est pas d’accord avec sa décision de taire la RCTV. Sur cette dernière décision d’ailleurs, le président vénézuélien est en froid avec le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains.
S’il y a à l’étranger des gens qui ne sont pas du tout content de ce nouveau socialisme et du vent annoncé des renationalisations des entreprises privatisées, c’est bien l’oligarchie américaine, qui a beaucoup investi dans l’économie du Venezuela. Washington, c’est peu dire, pèsera de tout son poids pour obtenir une compensation substantielle pour ses firmes.
Si le «socialisme du 21e siècle» doit prospérer en muselant la presse, il clair que Caracas trouvera sur son chemin les médias internationaux ainsi que les associations de défense de la liberté de la presse. Autant dire que des temps houleux pourront être vécus au Venezuela.
Un autre grand danger menace la nouvelle politique de Chavez. Il s’agit même du pétrole sur lequel il fonde beaucoup d’espoir. En effet, si les cours du brut venaient à dégringoler, on ne vendra pas cher la peau de la politique du commandante, qui aura du coup du mal à financer la réalisation de ses réformes sociales. C’est dire que Hugo Chavez est en train de s’adosser sur du pas solide, son empire pouvant s’effondrer à tout moment.
En attendant, c’est Georges Bush qui doit être dans une position inconfortable, lui qui voit croître à sa porte des pays hostiles : Venezuela, Cuba, Bolivie, Nicaragua, Equateur…
San Evariste Barro
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