Faillite au sommet de la RCA
REPUBLIQUE DE CENTRAFRIQUE
Faillite au sommet
Parce que l’échec du gouvernement Doté est avant tout le sien, le Général Bozizé et l’ensemble de son équipe devraient eux aussi glisser discrètement la clé sous le paillasson et partir sur la pointe des pieds. Avant qu’il ne soit trop tard.
Des questions se posent tout de même. Le Premier ministre est-il parti de lui-même? S’il est rappelé, M. Doté osera-t-il revenir après ce désaveu cinglant ? Un règlement de comptes ou un canular, ce renversement du gouvernement acculé par une motion de censure déposée par la majorité parlementaire? Les élites politiques centrafricaines voudraient-elles nous convaincre de leur réelle participation au jeu démocratique? Dans ce cas, les députés passeraient pour des gens sérieux et courageux. À condition de jouer leur partition jusqu’au bout.
C’est une évidence qu’il n’est pas donné à tout le monde de reconstruire sur la base de petites révolutions de palais. Surtout pas en faisant du sur-place. Sur ce point, depuis les indépendances factices des années soixante, aucun régime centrafricain n’aura réellement convaincu l’opinion africaine de sa capacité à gérer les affaires du pays. Bien au contraire ! L’on est même enclin à se demander quelle malédiction frappe
En effet, on aura tout vu : de l’aide française à l’assistance libyenne, en passant par les bienveillantes attentions des dirigeants tchadiens face à la rébellion qui menace de manière sporadique Bozizé de Centrafrique et ses acolytes au pouvoir à Bangui.
Franchement, il faut déplorer et dénoncer l’incompétence de la classe politique centrafricaine autant que son insensibilité vis-à-vis des problèmes du peuple. La question se pose de savoir de quels revenus vivent les dirigeants et leurs proches? Sont-ils également privés de leurs salaires comme les travailleurs? Ont-ils jamais expérimenté la misère des étudiants centrafricains sans leurs maigres bourses ? De quoi vivent ces dirigeants et leurs thuriféraires ?
Le mal centrafricain est bel et bien ce mal africain, qui s’appelle mal gouvernance tout court. Avec ses dérives et ses excès qui désorientent parfois, mais ne surprennent jamais. Car, comme tant d’autres, ce pays est une fabrication de l’histoire coloniale, un accident de parcours que l’on voudrait ne jamais avoir enregistré. En émiettant les pays du continent, le colonisateur savait pertinemment dans quel intérêt il le faisait : le sien. Aucun doute que les micro-Etats africains issus de la nuit coloniale, survivraient difficilement à la balkanisation du continent, encore moins à l’enclavement et à la dilapidation des patrimoines nationaux. Sinon, comment comprendre les échecs répétés des différents pouvoirs qui se sont succédé à Bangui? Comment, avec autant de richesses (forêt, diamants, etc.) et une population si peu nombreuse, ces régimes qui n’ont jamais rien eu de commun avec la démocratie républicaine vraie, ont-ils pu tour à tour jeter l’éponge après avoir fait le ménage dans le palais à coups de balai sans avoir jamais pu régler le sempiternel contentieux salarial?
L'incurie des dirigeants centrafricains symbolise la mal gouvernance sur tous les plans. Une malgouvernance qui permet de mettre en évidence la présence d’une oligarchie militaire qui a oublié le sens de l’honneur et de la patrie, et qui s’embourgeoise impunément sur les ruines d’un Etat moribond. En outre, l’existence d’une élite qui n’en est vraiment pas une en raison même de son inféodation à la race des prédateurs de l’économie nationale.
Par ailleurs,
Il faut venir en urgence au chevet du peuple centrafricain. Sous l’égide de l’Union africaine, les organisations sous-régionales et régionales, la coopération multilatérale devraient s’impliquer dans la résolution de cette crise. Le constat d’incapacité du pouvoir étant évident, il importe de prendre des mesures pour sauver le peuple centrafricain en danger en créant les conditions d’un dialogue constructif qui implique toutes les parties, y compris l’opposition, la société civile, la rébellion et la diaspora. Il faut surtout éviter de gagner du temps en reproduisant des recettes qui conduiraient à tourner en rond comme c’est le cas depuis fort longtemps.
Le Pays du 22 janvier 2008
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