«Fleur de Vie» : Un cri du cœur des drépanocytaires
«Fleur de Vie»
Un cri du cœur des drépanocytaires
«Fleur de Vie» est une association qui lutte pour une meilleure prise en charge et la sensibilisation des drépanocytaires au Burkina. Son président-fondateur, Seferiba Salif Soulama, 33 ans et webmaster, a vécu une douloureuse expérience qu’il l’a motivé à mettre en place cette association. Il nous en parle dans l'entretien qui suit.
Quand avez-vous connu votre statut de drépanocytaire ?
• Je dois d’abord dire que selon la compréhension du profane que je suis, la drépanocytose est une maladie héréditaire du sang, qui touche précisément les globules rouges en provoquant une malformation de ceux-ci.
C’est à l’âge de 12 ans que j’ai commencé à en ressentir les premières manifestations. Mais en ces moment personne de ma famille ni de mon entourage ne savait que c’était des crises drépanocytaires que j’avais. D’ailleurs je me rappelle le premier jour où je suis rentré avec des douleurs au niveau du bras droit : ce jour, en lieu et place du dispensaire que j’espérais j’ai eu droit à des coups de fouet : mon oncle était persuadé que je m’étais blessé au karaté à l’école. Finalement j’ai dû souffrir trois jours durant jusqu'à ce que les douleurs passent d’elles-mêmes.
Comment a-t-on su finalement que vous souffriez de la drépanocytose ?
• Il a fallu que je vienne en vacances à Ouagadougou. Et un jour après une séance de football, j’ai encore eu des douleurs horribles, cette foi-ci au niveau des deux bras. On m’a conduit dans une clinique, et l’infirmier ou le docteur qui ma reçu ce jour a soupçonné des crises drépanocytaires et nous a fait faire l’électrophorèse, qui a finalement confirmé son diagnostique. Voila comment on a su que j’étais drépanocytaire.
Le pire aurait-il pu arriver ?
• Sans nul doute. Cela pouvait traîner et si on n’avait pas eu la chance de tomber sur cet homme de la santé dans cette clinique, la suite aurait pu être dramatique. Mais aujourd’hui, avec un peu de recul, je me demande combien de drépanocytaires sont morts ou ont subi des séquelles irréversibles parce ce qu’ils ignoraient leur statut.
Justement, pouvez-vous nous parler de la situation des drépanocytaires aujourd’hui au Burkina ?
• Il serait prétentieux de ma part de dire que je peux parler avec certitude de la situation des drépanocytaires au Burkina. Cependant en partant de mon cas et surtout en me référant un peu aux cas dont j’ai été témoin, je peux vous assurer, sans hésiter, que la majorité des drépanocytaires souffre en silence. Nous endurons des douleurs interminables et insupportables lors de nos crises, et cela n’est que la phase visible de notre mal ; notre souffrance est indescriptible ; le drépanocytaire se sent marginalisé et diminué, contraint de vivre avec un fardeau. Le drame, c’est que cela se passe sous le regard impuissant voire inconscient des familles et des proches.
En parlant de handicap, est-il exact que vous avez été victime d’un accident vasculaire au niveau des yeux, dû à cette maladie ?
• En effet, le 9 avril 2006, à mon réveil je me suis rendu compte que je ne voyais plus de l’œil gauche. Ce jour-là, j’ai vaqué à mes occupations, quoiqu'inquiet. Le lendemain, j’ai été consulté dans une clinique de la place, et c’est là qu’on m’a fait savoir que j’avais un saignement dans l’œil et que ça passerait. Malheureusement, après deux jours il n’y avait toujours pas d’amélioration. Alors, j’ai été en ophtalmologie à Yalgado. L’infirmière qui m’a reçu m’a aussitôt référé le lendemain au Professeur Méda. J’ai eu la chance d’être vu par le Dr Pierre Guiguemdé et par le Professeur Méda. C’est à ce moment que le Professeur m’a dit que je souffrais d’une rétinopathie drépanocytaire (juste pour résumer) et m’a fait immédiatement hospitalisé avec des consignes fermes. Quelques jours plus tard, on a détecté que j’avais en plus un décollement de la rétine. Ma situation était alors plus critique et il était question de m’évacuer d’urgence en France. Cela a été une autre paire de manches.
Finalement, avez-vous été évacué ?
• Oui, par la grâce de Dieu avec le soutien du ministère de
Que pensez-vous, en tant que drépanocytaire, que l’on pourrait faire pour soulager ceux qui souffrent de ce mal ?
• Je pense qu’il est primordial que les malades s’organisent d’abord entre eux en association, pour constituer une force de plaidoyer auprès de l’Etat et des organismes divers intervenant dans le domaine de la santé afin de faire bouger les choses en leur faveur.
Je ne dis pas que l’État ne fera rien ! Seulement vous savez bien qu’il y a beaucoup d’autres priorités auxquelles l’Etat doit faire face. Il appartient donc à nous, les drépanocytaires, de nous lever pour défendre notre cause ; ainsi, l’Etat sera bien obligé, tel un père envers son enfant, de nous écouter et de nous accompagner. D’ailleurs, avec des amis, nous avons mis en place une association de lutte contre la drépanocytose.
En outre, il faut, entre autres, doter Yalgado d’une unité autonome d’hématologie avec des missions claires et des moyens pour lutter contre la drépanocytose et les autres hémoglobinopathies.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette association que vous avez créée ?
• C’est une association de lutte contre la drépanocytose, dont l’idée a germé dans les coulisses de Yalgado quand j’étais hospitalisé. C’est un cri du cœur pour dire : stop, il faut qu’on agisse ; c’est aussi la tenue d'une promesse faite à Dieu que, s’il me permettait de revoir avec mes yeux, je m’engage à lutter contre la drépanocytose.
L’association s’appelle «Fleur de vie». Elle a été mise en place afin d’apporter une contribution à la sensibilisation et à la lutte contre les hémoglobinopathies en général et la drépanocytose en particulier.
Un appel à lancer ?
• Nous souhaitons qu’il y ait une accélération au niveau étatique pour la mise en place des différentes politiques et structures de lutte contre la drépanocytose. J’invite les parents à faire l’électrophorèse de leurs enfants dès la naissance, sinon le plus tôt possible. J’invite aussi les gens à faire leur électrophorèse s’ils ne l’ont pas fait, quel que soit leur âge.
Et j’espère de tout mon cœur que le ministère de
Propos recueillis par
Alima Koanda
stagiaire
L’Observateur Paalga du 8 mai 2008
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