Le réalisme des députés nigériens dans les rebellions touarègues
Rebellions touarègues
Le réalisme des députés nigériens
Comment réagira le Mouvement des Nigériens pour
La décision des parlementaires serait-elle un désaveu de cette politique ? Serait-ce une sorte de perche tendue au président Mamadou Tandja pour l’aider à sortir de la crise toute honte bue? Ou y aurait-il volonté réelle de paix?
Quelle que soit la raison, le fait est que les parlementaires nigériens sont angoissés par la préparation des prochaines élections. Le recensement en vue de la reprise du fichier électoral devra débuter le 15 mai prochain sur l’ensemble des 265 communes du Niger, les élections générales devant intervenir en fin 2009.
Comment les choses vont-elles se passer sur le terrain s’il n’y a aucune accalmie? Un contexte de non-apaisement, de guerre et de conflits est fort préjudiciable, et on le sait à Niamey. Les honorables élus du peuple nigérien savent mieux que quiconque qu’il leur sera très difficile d’aller battre campagne et de négocier le renouvellement de leur mandat sur un territoire aussi vaste qu’insécurisé.
Dans leur communiqué, ils expriment leur « indignation » face à l’usage de mines et la recrudescence des attaques armées menées par le MNJ. Et les élus d’inviter les rebelles à « cesser tout acte de violence et à libérer les otages ». La paix est donc plus que désirée du côté du Parlement qui déplore que la situation ait engendré le déplacement massif de populations vers des lieux précaires, la fermeture des projets de développement. L’insécurité dans le nord du Niger se traduit par des pertes de plusieurs milliards de francs CFA.
Reste à savoir comment le MNJ appréciera cette volte-face inattendue. A moins que des négociations ne soient déjà en cours.
Est-il besoin de rappeler que jusque-là le pouvoir de Niamey refusait de reconnaître la réalité de la rébellion, et qu’il se bornait à qualifier de « bandits armés » un groupe qui, au-delà du groupe touareg, clame à tous vents qu’il veut plus de justice et de démocratie pour l’ensemble du peuple du Niger?
Le MNJ a toujours revendiqué 50% des revenus de l’uranium au profit du développement de la zone touaregue ainsi que des « dédommagements » pour les habitants « expropriés » des terres qui abritent les gisements.
D’après la multinationale AREVA, l’exploitation de la mine d’Imouraren placera le Niger au deuxième rang mondial, avec une production de près de 5000 tonnes d’uranium par an. Cela favorisera la création de 1400 emplois permanents et de nombreuses autres possibilités. Cette zone qui avait déjà fait l’objet d’attaques de la part du MNJ, demeure encore une cible de la rébellion. Le Niger a donc réellement besoin de paix et d’unité pour profiter de cette manne.
Il va sans dire que si les députés nigériens recommandent à présent au gouvernement nigérien de prendre langue avec le MNJ, c’est que tout le monde, peut-être encore pas le président Tandja, est convaincu qu’il ne sert à rien de nier l’évidence et de continuer à prêcher inutilement dans le désert…
Peut-être les députés nigériens devraient-ils prendre sur eux de faire libérer au plus tôt notre confrère Moussa Kaka? Cela permettra sans doute de faire baisser la tension et de favoriser l’instauration du dialogue avec un groupe qui, aujourd’hui, pourrait faire du dossier Moussa Kaka un élément de référence dans son combat pour plus de justice.
Pour avoir fait taire le journaliste, le pouvoir de Niamey se trouve aujourd’hui acculé et pris à son propre piège. La vérité heurte aujourd’hui la conscience des représentants du peuple qui ne peuvent plus se taire devant les difficultés de l’armée nigérienne, face à la détermination et à l’organisation du MNJ.
Ça crève les yeux : l’armée nigérienne ne peut venir à bout de la rébellion sur ses propres terres. Et plutôt que de chercher à s’armer inutilement pour verser encore et encore du sang nigérien sur le sol nigérien, il vaut mieux préserver les maigres ressources au profit du développement.
Maintes fois "Le Pays" l’a écrit dans ces colonnes. La paix passe nécessairement par un changement de mentalité de part et d’autre, mais aussi et surtout à Niamey par la révision d’une politique jusque- là improductive.
Il est illusoire de croire qu’on peut remporter la victoire face à un groupe de maquisards sur leur propre terrain. Des maquis sud-américains à ceux du Vietnam en passant par l’Algérie, l’histoire est trop riche d’exemples de débâcles d’armées régulières face à des rébellions bien organisées et déterminées.
Il faut écouter la voie de la sagesse, car la violence n’a jamais contribué à construire la paix. A un moment donné, il faut bien arrêter pour négocier. A force de tergiverser, on finit par rater le tournant historique.
Les élus du Niger, toutes tendances confondues, avaient déjà surpris l’an dernier lorsqu’ils avaient congédié le précédent chef du gouvernement nigérien par une motion de censure. Ce Parlement qui a visiblement le sens des responsabilités, voudrait peut-être tendre la main qui sauve au président Tandja. Mais saura-t-il se saisir de cette perche et à temps? Tout comme dans le traitement du dossier Moussa Kaka, il est à craindre que le chef de l’Etat nigérien ne s’enferme encore une fois dans un mur de silence et d’indifférence.
Le Pays du 15 avril 2008
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