"Le silence radio, c'est à la maison, pas à la tour" (grève à l'ASECNA)
Boukary Pafadnam de l'ASECNA
"Le silence radio, c'est à la maison, pas à la tour"
Du 29 au 31 juillet 2008, des contrôleurs de huit (8) pays membres de l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) observent un mouvement dit de "Silence radio".
A en croire le représentant de l'Agence au Burkina, Yarcé Boukary Pafadnam, que vous lirez dans les lignes qui suivent, des mesures sont prises pour assurer la sécurité du trafic aérien. Pour lui, cette grève est "illégale et sauvage", que son institution travaillera à éviter à l'avenir.
Comment se porte l'ASECNA ?
• Je peux dire que ça va toujours puisqu'au dernier Comité des ministres de Malabo, il y a eu des décisions allant dans le sens de stabiliser l'ASECNA. Ce sont de très bonnes résolutions pour faire face à la crise. L'Agence se porte bien dans le sens où on arrive à faire le travail dont on a la charge et les travailleurs sont payés.
Quelles sont les décisions qui ont été prises concernant Dakar qui menace toujours de se retirer du patrimoine commun ?
• Logiquement, ce n'est pas à moi de parler de ces décisions, parce qu'il y a un responsable qui a représenté notre pays à cette réunion-là. Mais en gros, je peux vous dire que ce sont des décisions allant dans le sens de résoudre les problèmes qu'on a avec le Sénégal. On a pris des résolutions demandant à l'Etat sénégalais de respecter les textes de la convention. Vous savez que ces derniers temps on a constaté des défaillances à ce niveau. L'ASECNA a été aussi invitée à prendre des précautions pour trouver un autre siège au cas où le Sénégal se retirerait.
Depuis hier, les contrôleurs de 8 pays membres observent un mouvement dit de "silence radio" ; comment en est-on arrivé là ?
• En réalité, il y a le président d'une fédération d'associations qui a lancé un préavis de grève ; je précise bien une fédération d'associations et non un syndicat des représentants d'associations huit (8) pays membres dont notre pays ont accepté de signer ce préavis. Les contrôleurs des autres pays ont refusé le mot d'ordre.
En réponse à ce préavis, l'Agence a rappelé que nous sommes dans un protocole d'accord avec l'ensemble des agents, des syndicats, des associations et la direction générale de l'ASECNA. Les ministres ont toujours rappelé que c'est dans le cadre de ce protocole que les problèmes doivent être réglés et dans ce sens, il y a une série de réunions qui est prévue notamment dans la deuxième quinzaine du mois d'août. C'est pour vous dire qu'on ne comprend pas le motif réel de cette grève dont la principale revendication est le recrutement des agents de niveau Bac + 2. Des travailleurs qui fixent à l'employeur ce qu'ils doivent faire dans les recrutements ! Normalement, ils doivent avoir des revendications catégorielles.
Etant signataire du protocole d'accord, les contrôleurs doivent se soumettre au système de négociations. Le plus grave dans cette situation, c'est que c'est une fédération d'associations qui, en principe ne doit pas aller en grève. D'ailleurs, ladite fédération n'a été reconnue qu'au Burkina qu'en 1995, dans les autres pays membres, elle ne l'est pas. Pour ce qui concerne les contrôleurs burkinabè, en aucun moment, ils ne se sont dérangés pour rencontrer la direction générale de l'aviation civile, ni le ministre des Transports, encore moins la représentation de l'ASECNA dans notre pays. C'est seulement à la veille que les meneurs ont animé une conférence de presse à ce sujet.
Vous avez fait recours à la justice pour contrecarrer le mouvement ; pourtant, il semble tenir !
• Nous ne sommes pas les seuls au Burkina à avoir attaqué le mouvement en justice. Mais pour ce qui nous concerne, la justice a rendu son verdict en déclarant la grève illégale tout en ordonnant à la fédération des associations professionnelles des contrôleurs aériens de l'ASECNA (FAPCAA) et à un contrôleur burkinabè qui avait signé le document dans ce sens de lever le mot d'ordre de grève. Malheureusement, ça n'a pas été fait. Comment voulez-vous qu'on admette cela ? La même condamnation a eu lieu à Abidjan et les tribunaux nigériens ont été plus sévères en condamnant les meneurs aux dépens.
Non seulement l'ordonnance du tribunal n'a pas été respectée, mais aussi les réquisitions du ministère. C'est d'autant plus grave que nous gérons un service public dans un domaine aussi délicat que la sécurité. C'est pourquoi nous allons prendre nos responsabilités.
Au deuxième jour de ce mouvement social, quel bilan faites-vous dans les pays concernés et principalement au Burkina ?
Il faut dire que nous avons pris nos dispositions pour permettre à ceux qui veulent travailler de travailler dans la sérénité. L'aéroport est resté ouvert à l'heure où je vous parle, il n'y a que le Niger, où le président du FAPCAA a été suspendu, qui connaît quelques problèmes.
Le silence radio veut dire qu'ils ne répondent pas aux appels des avions. Avant de monter, nous demandons aux contrôleurs de signer qu'ils vont s'acquitter de leur tâche ; ceux qui veulent faire un silence radio n'ont pas leur place à la Tour mais à la maison. C'est ainsi qu'au premier jour du mouvement nous avons assuré, entre autres, les vols d'Air France, de Royal Air Maroc, d'Air Méditerranéen, d'Afriqyah, les vols présidentiels et j'en passe. Au deuxième jour, ce matin, Air Burkina vient de décoller. Les grévistes ont confié à un journal que les contrôleurs qui ont fait le travail ne sont pas qualifiés ; c'est aberrant puisque parmi ces derniers il y en a qui les ont formés.
Vous voulez dire par là que l'aéroport international de Ouagadougou a fonctionné normalement ?
• Je dis bien que l'aéroport a fonctionné normalement au grand dam de ce petit lobby de contrôleurs qui veulent semer la pagaille. Nous n'allons pas accepter parce que tous les corps qui travaillent à l'aéroport peuvent bloquer son fonctionnement. Si nous admettons qu'un corps, de façon illégale, projette de bloquer cet espace comme c'est le cas actuellement, c'est grave ! Ce qui est sûr, c'est qu'il y a la fermeté au niveau de l'ASECNA, et je sais que c'est le même état d'esprit dans les ministères de tutelle.
En quoi consiste le travail des contrôleurs ?
• Leur travail dans le système ASECNA consiste à gérer le trafic aérien. De façon concrète, c'est eux qui donnent les autorisations pour démarrer ; ils précisent le niveau auquel le pilote doit voler et donnent les informations pour que les avions n'entrent pas en collision.
D'aucuns disent que les avions sont équipés de sorte à se passer quelquefois du travail des contrôleurs ; est-ce exact ?
• Les avions ont ce qu'on appelle des équipements embarqués qui leur permettent de détecter les risques de collision. Ce système commande à l'appareil soit de décendre, soit de monter. Tous les avions qui transportent des passagers sont équipés de ce système. En dehors de ça, les pilotes font de l'auto-information, et s'informent entre eux parce que certains endroits du monde ne sont pas couverts par le contrôle.
Vous dites que la grève a été organisée par des associations ; est-ce à dire que les travailleurs de l'Agence n'ont pas de syndicat ?
• Si ! l'ASECNA compte quatre (4) syndicats ; ceux-ci ont rencontré les contrôleurs pour les mettre en garde contre leur mouvement parce que le moment n'est pas propice. Malheureusement ils n'ont pas été écoutés. Il y a lieu qu'on réfléchisse pour que ce genre de situation ne se reproduise pas. Les gens qui veulent contribuer à faire éclater l'ASECNA ne savent pas le risque qu'ils encourent. Nous sommes la seule structure qui arrive à payer ses agents, même dans les Etats en guerre. C'est une structure qui a garanti un revenu confortable et régulier à ses agents ; en période de crise, il faut absolument éviter ces actions.
Quel appel auriez-vous à lancer aux usagers du trafic aérien et aux grévistes ?
• Au nom de la Direction générale, je présente mes excuses pour les désagréments que pourraient vivre les usagers. Je voudrais les assurer que nous prendront toutes les dispositions utiles pour éviter des grèves illégales et sauvages. Concernant les grévistes, je demande à ceux qui ont toujours la tête sur les épaules de respecter les règlements de notre patrimoine commun et les ordonnances de notre justice, car nul ne peut les aider dans leur voie.
Propos recueillis par
Abdou Karim Sawadogo
L’Observateur Paalga du 31 juillet 2008
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