L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Les deux jours les plus longs au Liban

Liban

Les deux jours les plus longs

 

C'était prévu.

Plus que deux jours et le mandat d’Emile Lahoud, le président libanais, prendra fin au terme de la Constitution. Depuis, d’intenses tractations se mènent pour lui trouver un successeur. Mais les négociations piétinent car la classe politique, très divisée, n’arrive pas à s’accorder sur un nom. Et jusqu’à hier, aucune lueur d’espoir ne pointait à l'horizon si bien qu’on peut parier que le pays du Cèdre court malheureusement vers un vide institutionnel à la tête de l’Etat. Si par malheur cette situation se concrétise, le risque d’un éclatement du Liban sera plus que jamais actuel.

Après ces multiples guerres civiles qu'a connu ce pays et les incursions mortelles de grands voisins de ce pays, l'inquiétude est grande quand à voir ce pays renouer avec les armes.

C’est dans ce contexte de grandes incertitudes que les députés vont siéger dès aujourd’hui pour élire le nouveau président. Dans ce pays, c'est bien l’Assemblée nationale qui, à la majorité des deux tiers, élit le chef de l’Etat même si ce dernier est traditionnellement un chrétien maronite. Un suffrage indirect diront les puristes.

Seulement, ce qui semblait presqu'un acquis reste aujourd’hui très problématique puisque le camp chrétien est très divisé notamment à cause, entre autres, de la défection, ou du flirt, du général Michel Aoun, avec les islamistes du Parti de Dieu, le Hezbollah. Le général, fort des 70% de l’électorat chrétien qu’il avait pu capter lors des législatives de mai 2005, ne se prive de lorgner du côté de la présidence. En bon stratège, il mise sur ses accointances avec le Hezbollah pour montrer qu’il est le seul Libanais capable de négocier avec ces islamistes pour qu’ils entrent dans les rangs en mettant fin à la lutte armée. De plus, de tous les prétendants au fauteuil présidentiel, Michel Aoun est certainement le seul qui peut bénéficier de la grâce du Hezbollah. Et ça, c’est un critère à ne pas négliger. Ce n’est donc pas un hasard si Nasrallah Sfeïr, le patriarche de l’Eglise maronite, a mis le nom du général sur sa liste de proposition des présidentiables.

Seulement, reste à savoir si Saad Hariri et Nabih Beeri, respectivement de la majorité et de l’opposition parlementaires, vont parvenir à aplanir leurs différends et  s’entendre sur le nom du successeur d’Emile Lahoud. En effet, en dernier ressort, ce sont quand même eux, les députés, qui élisent le président. Avec seulement 68 élus sur 127, le camp de Saad Hariri est loin de pouvoir décider tout seul.  Pour pouvoir peser d'un quelconque poids, il lui faudra prendre langue avec d'autres tendances de la scène politique libanaise. Et dans ce jeu où aucune formation politique ne domine vraiment de toute sa superbe, l'opposition a bel et bien forcément son mot à dire.

Les positions étant tranchées, il va être difficile de trouver un consensus. A moins que, finalement, les députés ne se résolvent à élire le président à la majorité simple. Une hypothèse que rejette d’ores et déjà l’opposition en menaçant, si une telle éventualité advenait, de se choisir son propre président et de composer son propre gouvernement. Toute chose qui consacrerait de facto la division du Liban.

La situation est d’autant plus complexe que, dans le jeu politique libanais, les influences extérieures sont très fortes. Que ce soit Israël, la Syrie ou l’Iran sans oublier les Etats-Unis et l’Union européenne, tous font des pressions en dictant des consignes à travers leurs «valets locaux». Les consignes étant contradictoires et les donneurs d’ordre inconciliables, il est évident que les receveurs d’ordres ne pourront jamais s’entendre, chacun ayant quelque part un compte à rendre. Difficile dans ces conditions de résoudre la crise sans un accord tacite entre ces forces extérieures qui tirent les ficelles sur la scène politique libanaise.

Voici un pays qui aurait pu être un paradis et que ses propres fils et les pays limitrophes ont réussi à polluer, à transformer en un enfer, en un endroit où rien n’est sûr, où tout peut péter à un moment ou un autre. Et le fait que l’écrasante majorité de ses ressortissants vivent hors du pays, en est la preuve tangible.

Mais quel que soit le compromis, on n’aura fait que différer le clash puisque le prochain président ne pourra pas jouer pendant longtemps au trapéziste sans se casser la figure, car il est difficile d’assumer à bien une telle haute charge, en passant tout son temps sous les fourches caudines des différents camps qui vont le tenir en lest.

Espérons quand même que les politiques sauront trouver un modus vivendi avant le deadline c'est-à-dire ce jour fatidique du vendredi 23 novembre. Ainsi, la communauté libanaise au Burkina pourra célébrer avec plus de fastes la fête nationale du pays du Cèdre.

En tout cas Joseph Hage, le PDG de Hage Matériaux et consul honoraire du Liban au Burkina, en a bien besoin, lui qui commémore avec faste vendredi prochain la fête nationale de son pays.

 

San Evariste Barro

L’Observateur Paalga du 21 novembre 2007



20/11/2007
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