L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Même pas de foot pour noyer son chagrin au Kenya

Kenya

Même pas de foot pour noyer son chagrin

 

 Pendant que l’Afrique vit la fête du football, à savoir la Coupe d’Afrique des nations (CAN), édition 2008, le Kenya, qui n’a pu  débourser 53 millions de shilling pour bénéficier des images venant du pays d’Abédi Ayu Pélé, éprouve des difficultés à offrir un tant soit peu du plaisir à ses populations, déjà meurtries par les violences postélectorales. Certes d’aucuns diront que cela ne constitue pas à ce stade une priorité pour les amoureux du sport-roi kényans, mais il est indéniable que ce pays ne mérite pas d’être marginalisé davantage. En effet, la boule de cuir est devenue une affaire tellement économique qu’on s’en fout du mendiant venu, l’essentiel étant d’honorer la facture afin de pouvoir retransmettre les images de la CAN.

Il faut reconnaître que le président contesté du Kenya, Mwai Kibaki, doit être en panne d’inspiration, car en pareille situation, certains dirigeants ne lésineraient pas sur les moyens pour occuper, ne serait-ce que momentanément, les partisans de leurs protagonistes, en attendant de trouver les stratégies ou stratagèmes imparables pour prendre le dessus pour de bon. La «victoire volée» du 27 décembre 2007 que réclament vainement l’opposant Raila Odinga et ses supporters ajoutée à l’incapacité de la plupart de Kenyans, ne disposant pas d’antennes satellitaires, de vivre la fête footballistique va alors renforcer une ambiance déjà délétère. En effet, les violences postélectorales se sont poursuivies dans ce pays réputé stable, où au moins 7 personnes ont été tuées entre samedi soir et dimanche. Ce qui porte à 48 le nombre de personnes tuées, en grande majorité par les forces de l’ordre, depuis le 16 janvier et à plus de 700 les morts en trois semaines.

C’est dans ce climat extrêmement tendu qu’arrive, en principe, aujourd’hui l’ancien secrétaire des Nations unies Kofi Annan pour tenter d’amener les différentes parties en conflit à accepter le dialogue. Une mission qui s’avère très délicate vu que quelques jours auparavant il avait été la cible du ministre des Routes et des Travaux publics, John Michuki, qui a déclaré à la presse : «Si Kofi Annan vient, ce n’est pas à notre invitation… Nous avons gagné les élections, nous ne voyons pas l’objet de la venue de quiconque pour une médiation sur un partage du pouvoir». Le président Mwai Kibaki fera  monter davantage le mercure en décidant que Kofi Annan est personnage non grata dans son pays. De quoi vraiment inquiéter plus d’un, notamment le médiateur, qui subitement a reprogrammé sa visite pour aujourd’hui, car souffrant d’un fort accès de grippe.

Du côté de l’opposition, le ton n’était pas aussi rassurant pour le négociateur de la Communauté internationale, puisque Raila Odinga, qui s'est rendu dans une église de Kibera dimanche matin, a déclaré qu'un dialogue politique était nécessaire, mais «pas avec des hypocrites». Et il a terminé son discours en swahili en prononçant ces paroles ambiguës à l'adresse de ses supporters : «Vous savez ce qu'il vous reste à faire».

A  l’évidence, Kibaki et ses ouailles souffrent vraiment qu’on vienne les importuner après leur victoire, même si aux yeux de la Communauté internationale les choses ne se sont pas déroulées de façon nette. En effet, avant Annan, la même hostilité avait été observée à l’endroit du président ghanéen, John Kufuor, président en exercice de l’UA (Union africaine) lors de sa récente visite. Et Mgr Desmond Tutu non plus, autre figure emblématique, n'a pu calmer les esprits. Si rien n’est d’avance perdu, rien également n’est d’avance gagné avec cette nouvelle médiation. Certes le ministre kenyan des Affaires étrangères, Moses Wetangula, en saluant cette visite qui vise à «faciliter le dialogue entre les dirigeants politiques pour parvenir à une solution durable à l’actuelle crise politique dans le pays», vient de faire une grande pirouette pour montrer la bonne volonté subite des acteurs, mais ce sera dangereux de croire aux embrassades des politiques le jour avant les nombreuses attaques sanglantes la nuit venue. Le Kenya est aujourd’hui en proie à des agressions interethniques, car la démocratie y a échoué de par la faute d’hommes sans scrupules. Une situation qui doit absolument amener d’autres pays qui vivent une relative stabilité à tirer les enseignements qui siéent.

 

Cyr Payim Ouédraogo

L’Observateur Paalga du 22 janvier 2008



22/01/2008
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