L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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PAI : «Blaise a toujours cherché à liquider le PAI»

PAI

«Blaise a toujours cherché à liquider le PAI»

 

Remplacer les démissionnaires, examiner les dégâts qu’ils ont causés au sein du parti, travailler à la restructuration du parti surtout au lendemain des législatives de mai 2007, tels ont été les grands sujets du Comité central (CC), instance de décision entre deux congrès  du Parti africain de l’indépendance (PAI), qui s’est tenu les 11 et 12 août derniers dans les locaux de l’Atelier théâtre  burkinabè (ATB). Un CC marqué par le réquisitoire qu’a prononcé le président du parti, Soumane Touré, contre  certains militants et surtout contre le président du Faso, «accusé d’avoir toujours voulu liquider le parti».

 

Soumane Touré a d’abord décliné trois raisons qui expliquent la tenue de ce Comité central (CC) :

- la confection précipitée des listes électorales des Balé, du Kénédougou et  du Mouhoun par Alphonse Bonou et Toundoum  Sessouma (Ndlr : qui ont créé l’Alliance nationale pour le développement/Parti de la justice sociale (AND/PJS) tout en sachant qu’il fallait attendre le verdict du 8e congrès, prévu pour décembre 2006 ;

- l’invalidation par la CENI de 10 listes du parti. Sur ce point, Soumane Touré a reconnu que la faute est collective  (elle incombe à tous les membres du bureau exécutif central-BEC), car ils ont omis d’aller payer la caution au Trésor public ;

- enfin il y a le départ de Bonou, de Sessouma et de René Dicko, tous  du BEC. Et sur ces démissions, le patron du PAI a sa petite explication ; par exemple pour lui, Alphonse Bonou,  depuis 2000, s’agitait, et chacun savait qu’il allait lever un jour le masque. Il s’est trahi en «recevant des moyens pour empêcher le parti de se présenter à la présidentielle de novembre 2005». Et le comble : en pleine campagne électorale, les démissionnaires créent un parti social-démocrate !

«Non, le PAI n’a rien à voir avec la social-démocratie, l'idéologie du PAI n’est pas une variante de la social-démocratie... les éléments petits bourgeois qui finissent par créer ces courants au sein du parti sont inconstants, versatiles...».

 

Lamizana, Sankara, le PAI et la LIPAD

 

Puis ce fut à un petit cours d’histoire du parti que s’est livré celui qui dirigea jadis la toute-puissante centrale syndicale voltaïque (CSV). Retour dans les années 60. Feu Amirou Thiombiano  créa le PAI  le 15 août 1963 au lendemain de l’échec de la formation des Etats-Unis d’Afrique dont le héraut n’était autre que Kwamé Nkrumah.

Un Amirou Thiombiano qui «aurait pu se bâtir des châteaux comme beaucoup de directeurs généraux des douanes, mais qui est mort dans une case ronde à Fada». De 1975 à 1983  il y eut une guerre acharnée des dirigeants de l’époque pour liquider le parti et la LIPAD (créée en 1973) qui «menaient des activités d’éveil de la conscience des jeunes». Après le coup d’Etat du général Sangoulé  Lamizana du 8 février 1974, il y eut un tour de vis à l’encontre du PAI  notamment à travers la création du Mouvement national pour le renouveau (MNR) lors d’un meeting  de la couche supérieure de l’armée, le 30 novembre 1975 à la place du 3-Janvier, un meeting dirigé par l’intendant Marc Garango. C’était le début du règne du parti unique, auquel s’opposèrent le  PAI et la LIPAD par la grève générale des 17 et 18 décembre 1975 ; et une commission spéciale fut même instituée, ce que Touré Soumane appelle une conférence nationale  avant la lettre, qui est «une victoire posthume d’Amirou Thiombiano» sur tous ceux qui voulaient tuer les libertés démocratiques.

La période révolutionnaire fut aussi des années très dures pour le PAI «contrairement à ce que beaucoup de gens croient. Selon l’enfant de Diébougou, le Conseil national de la révolution (CNR) s'en  prenait au parti révolutionnaire à travers des putschs syndicaux et des répressions de ses militants. En effet, au-delà des apparences, tout opposait le CNR au PAI et si sous Lamizana on pouvait faire certaines choses sans risquer sa peau, sous Sankara, les  emprisonnements, les tortures et les menaces d’exécution  étaient des réalités. Une période pourtant assumée par Soumane Touré comme le dégagement, de sinistre mémoire, des instituteurs pour fait de grève». «C’est vrai que l’aile militaire du CNR a géré l’affaire de façon unilatérale, mais le PAI était au gouvernement, et nous en sommes coresponsables» (Ndlr : Emmanuel Dadjouari du PAI était à l’époque ministre de l’éducation).

 

Blaise, l’ODP/MT, le PAS et l’affaire Henri Zongo et Lingani

 

La période du Front populaire (1987-1991) fut  tout aussi dangereuse pour les héritiers politiques d’Amirou  Thiombiano,  foi de Touré Soumane. D’abord, le capitaine Blaise Compaoré a voulu que le PAI se saborde dans le Front populaire. Pour cela, il a rencontré individuellement, à l’époque, Adama Touré,  Philippe Ouédraogo et  Arba Diallo, qui ne firent aucun compte rendu de leurs entretiens de plusieurs heures en prétextant que c’était à titre privé qu’ils avaient été reçus». Ensuite, Blaise Compaoré a poursuivi «les putschs syndicaux débutés sous le CNR en suscitant la création de la CGTB et en créant le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) avec comme dirigeants Salif Diallo, Yarga Larba et Halidou Ouédraogo, alors conseiller juridique du président du Faso». En ce temps-là, en confiant la direction de la LIPAD à Daouda  Bayili, les membres du BEC acquis au Front populaire (FP) voulaient la disparition pure et simple du mouvement.

Mais il y a pire, se souvient le patron du PAI, car «devant l’inefficacité de toutes ces manœuvres, le FP envisagea même la liquidation physique de certains militants à la faveur de l’affaire Henri Zongo et Boukary Lingani». Aux négociations sur le programme d’ajustement structurel (PAS) en 1989, le PAI refusa de prendre part et demanda au chef de l’Etat de ne pas engager le pays sur cette voie. Selon Soumane Touré, Blaise répliqua en adressant une lettre de menace au PAI.

Ces estocades au parti ont été données sur le terrain des scrutins par… Daouda Bayili qui était l’homme lige du pouvoir et qui en désespoir de cause ira créer le PDR en 1993.

En 1995, le même Blaise Compaoré lancera une OPA (offre publique d’achat) sur le PAI en lui proposant la fusion avec l’ODP/MT ; et c’est Salif Diallo et Yé  Bongnessan qui en étaient les mandataires avec comme homme de main Philippe Ouédraogo, lequel fut mis en minorité. De 1995 à 1998, ce fut la guéguerre au sein du parti avec le congrès de 98 et  l’entrée du PAI dans le G14 et le début de… l’affaire PAI.

Conclusion de Touré Soumane sur cette question :  «La vérité au sujet des rapports entre le PAI et Blaise Compaoré, c’est que les deux ont certainement eu, à des moments donnés, les mêmes adversaires politiques, mais ils n’ont jamais eu les mêmes luttes… ils se sont retrouvés parfois sur les mêmes champs de bataille de notre peuple, mais sans jamais être de la même expédition… Blaise a sans cesse recherché la liquidation du PAI depuis son arrivée au pouvoir».

Quid des législatives de mai 2007 ? «Comme à tous les scrutins sous le soleil de Blaise, ce fut la fraude massive et institutionnalisée, et toute cette mascarade est entérinée et légalisée par les tribunaux administratifs et le Conseil constitutionnel dont le président a fini de convaincre de sa veulerie et de sa cupidité».

 

La nouvelle génération et le PAI originel

 

Faisant le procès de la crise des démocraties africaines, le président du PAI déclare «qu’il ne s’agit pas de l’échec de la démocratie de façon générale ; ce n’est pas non plus la démonstration que la démocratie est nuisible ou inutile à nos peuples et au développement .Il s’agit en réalité des limites et des échecs de la mise en œuvre de la démocratie libérale telle qu’on a  voulu l’imposer à nos peuples».  Une stratégie testée et appliquée par l’impérialisme qui a prétexté «l’incapacité des partis politiques à s’entendre» pour imposer des dictatures par armée interposée, comme ce fut le cas en 1974 avec Lamizana et en 1982 avec Saye Zerbo. Aujourd’hui, le but ultime du PAI reste d’actualité : l’unité de l’Afrique, comme l’atteste le dernier sommet de l’Union africaine (UA) consacré à ce sujet que Krumah avait campé dans son livre «L’Afrique doit s’unir». Le président du parti ajoute en substance que tous les régimes qui se sont succédé dans notre pays sont disqualifiés pour participer à cette unité, car inféodés à l’impérialisme, qui a pour noms OMC, institutions de Bretton Woods..., un impérialisme qui a mis le feu en Afganisthan et en Irak et qui veut mettre toute l’Afrique sous coupe réglée.

C’est pourquoi Touré Soumane a lancé à l’endroit de la nouvelle génération un appel à «s’approprier l’expérience du PAI..., à entretenir le  PAI comme état-major politique lucide et comme une école de la révolution pour la construction de l’unité africaine et l’indépendance véritable de nos peuples».

Ce Comité central s’est achevé par le remplacement des démissionnaires ; ainsi, Alphonse Bonou a été remplacé au poste de  secrétaire chargé des finances et du patrimoine par le jeune député Drissa Sanogho ; Toundoum Sessouma qui était au secrétariat général adjoint en charge de la communication et de l'administration est remplacé par Akotogué Oscar ; enfin le poste de secrétaire chargé des organisations de masse, qu’occupait René Dicko, échoit à Izdine Touré.

 

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga du 13 août 2007



13/08/2007
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