Peut-on siffler la fin de la partie entre Jean-Pierre Palm/Lassina Traoré/Saboteur ?
Ligne de touche
Jean-Pierre Palm/Lassina Traoré/Saboteur
Peut-on siffler la fin de la partie ?
On va encore dire que nous écrivons des bêtises, mais ce n'est pas grave. Et cette fois, circonstance aggravante, ce n'est pas un journaliste du rang comme Kader Traoré qui sera pris en flagrant délit de raconter des sornettes, mais le rédacteur en chef en personne. Gravissime !
C'est que, une fois de plus, l'histoire du football burkinabè ne s'écrit pas sur le terrain (où nous avons montré nos limites ces dernières années), mais en dehors des stades. Avec comme trame au fond, intrigues, coups bas, croche-pieds, méchancetés gratuites et toutes autres petitesses dont le sport-roi est maintenant coutumier.
Passe encore, dans un milieu où la passion est le sentiment le mieux partagé (rien de grand ne se fait d'ailleurs, c'est bien connu, sans cette flamme passionnelle), que les valeurs négatives soient véhiculées par le premier supporter venu qui, bien souvent, n'a jamais de sa vie tapé dans un ballon de foot, mais prétend néanmoins tout connaître. Mais quand c'est l'œuvre des principaux acteurs (joueurs, encadrement technique, responsables fédéraux, dirigeants politico-administratifs...), ça pose problème. Et c'est ce dont nous allons parler.
La semaine dernière en effet, le ministre des Sports, Jean-Pierre Palm (JPP), Drissa Traoré dit "Saboteur", l'ex-entraîneur de l'équipe nationale de football, et un certain Lassina Traoré, vice-président de l'Union nationale des supporteurs des Etalons (UNSE), ont disputé un match franchement malsain pour ne pas dire sordide.
De quoi s'agit-il ? Saboteur, qui est allé conter sa mésaventure aux journaux (cf. L'Observateur paalga n° 7004 du lundi 5 novembre 2007), dit avoir été agressé (du moins verbalement) le jeudi 1er novembre dernier vers 20 heures au stade du 4-Août alors qu'il venait d'assister aux matches Burkina # Togo (2-1) et Niger # Sénégal (3-2) dans le cadre de la première édition du tournoi de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Et d'accuser le sieur Lassina Traoré, passablement excité au demeurant, qui devisait, dit-il, avec JPP. Il aurait voulu dire que le jeune était en mission commandée, et que le ministre serait le commanditaire de son agression qu'il ne s'y serait pas pris autrement.
Comme il fallait s'y attendre, Jean-Pierre Palm, dont on connaît le tempéramment, convoqua aussitôt la presse pour exercer son droit de réponse, donner sa version des faits, en niant en bloc les propos de l'agressé tout en proférant quelques amabilités à son encontre. Dans le même temps, l'agresseur, dans un écrit assez discourtois voire irréverencieux (L'Observateur paalga du mardi 6 novembre), a assumé les faits et expliqué les raisons de sa colère. Entre autres griefs, il accuse ouvertement Saboteur d'avoir vendu les Etalons à l'encadrement technique togolais, avec lequel l'incriminé aurait passé deux bonnes heures la veille de la confrontation entre les deux pays.
Alors donc qu'on pensait l'incident clos (chacun ayant livré sa part de vérité), ce fut au tour du coach dépité de donner une conférence de presse pour dire notamment que les deux autres protagonistes de l'affaire se contredisaient. Et patati, et patata !
Notre propos ici n'est pas d'instruire un quelconque procès pour dire, in fine, laquelle des parties à raison ou tort, mais qu'il faut siffler la fin de cette partie, qui n'honore personne, et surtout pas le membre du gouvernement, qui a le plus à perdre dans cette polémique stérile.
En décidant de médiatiser un incident, qui sait banal, peut-être Saboteur, qui n'a jamais digéré les conditions de ses multiples évictions (la dernière datant d'avril 2007), joue-t-il dans le registre de l'intrigue et de la victimisation à bon compte en grossissant démesurément les faits. Pour autant, le ministre, en voulant répondre coup pour coup, n'a pas été particulièrement bien inspiré, surtout lorsqu'il est tombé dans le registre du parler faubourien. On peut certes comprendre le besoin qu'il peut éprouver de défendre son image et son honorabilité, en ne laissant pas la "désinformation" s'installer, mais de là à tenir certains propos, il y a sans doute un écart de langage dont il n'aurait pas dû se rendre coupable. Avait-il, par exemple, besoin de dire que "chacun connaît son camarade et de quoi son camarade est capable" ou que, "physiquement", il peut "plier" Saboteur s'il le veut ? A l'évidence, non.
D'abord, tout colonel de gendarmerie qu'il est, il n'en sait rien, puisqu'il n'a jamais croisé l'intéressé sur un ring. Ensuite, en s'exprimant ainsi, Palm se comporte comme le supporter Tartampion et ce faisant, lui qui prétendait ne pas "descendre dans la boue" est déjà au bord du marécage et il devrait prendre garde à ne pas s'embourber. Saboteur a au moins raison sur ce point, un ministre de
Et puis, entre nous, cette propension à rappeler à l'envi qu'on a été directeur général de
En débarquant au ministère des Sports, JPP venait avec la ferme volonté de nettoyer les écuries d'Augias dans un monde souvent gangrené par l'affairisme et la corruption, où on casse fréquemment du sucre sur le dos des acteurs. Il faut l'y encourager sans qu'il ait besoin d'en faire un peu trop. Et surtout, qu'il ne vienne pas accentuer les querelles de personnes et de clocher, qui sont l'une des plaies du sport burkinabè, principalement du ballon rond.
Alors, de grâce, balle à terre, car ce qui vient de nous être servi n'est pas joli joli. Quand deux personnalités au caractère bien trempé comme le sont Palm et Saboteur se croisent, ça ne peut que produire des étincelles, mais il faut savoir raison garder pour circonscrire l'incendie. Le football burkinabè, à la recherche d'ailleurs d'un président pour sa fédération, et qui a besoin de rebondir après ses multiples contre-performances, n'a pas besoin de ces chamailleries, qui sont loin de le faire avancer. Alors, que les uns et les autres s'écrasent un peu et qu'ils arrêtent de nous pomper l'air. Nous, nous avons soif de victoires, pas de ces vaudevilles sportifs dans l'art desquels certains sont passés maîtres.
Ousséni Ilboudo
L’Observateur Paalga du 12 novembre 2007
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