L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Réaction du gouvernement à la flambée des prix : Ce n’est pas bon… Et ce n’est pas arrivé

Réaction du gouvernement à la flambée des prix

Ce n’est pas bon… Et ce n’est pas arrivé

 

Le gouvernement, par la bouche de son porte-parole, Filippe Sawadogo, s’est fendu d’une déclaration, le 7 février 2008, pour réagir face à la flambée des prix. Cette sortie médiatique intervient le lendemain de la parution de notre dossier intitulé «Produits de première nécessité. Yaa yellé ! Ou quand l’ouragan «Flambée» frappe de plein fouet» ; un reportage dans lequel, le ministre chargé du Commerce était notamment interpellé. «Enfin !», se sont dit beaucoup d’auditeurs et de lecteurs devant ce titre de notre confrère Sidwaya dans son édition n°6108 du vendredi 8 au dimanche 10 février 2008: «Hausse des prix : Le gouvernement annonce des mesures énergiques». Mais après lecture du contenu, ceux qui vivent au quotidien cette folie des prix ont vite déchanté. En effet, s’il y a une annonce qui a agacé et déçu les attentes de plus d’un consommateur, c’est bien ce communiqué-là. Avec un ton mêlé d’une petite touche d’ironie, l’on aime à dire que les journalistes ne voient que les trains qui arrivent en retard et leur propension naturelle serait de dramatiser toute situation. Au risque donc de faire une petite entorse au style rédactionnel habituel de cette rubrique, nous allons nous effacer un moment pour vous rapporter les réactions de citoyens lambda (dans le journal en ligne lefaso.net) qui ont littéralement enragé après avoir parcouru la littérature gouvernementale. Le premier écrivit ceci : «Encore du bla-bla-bla ! J’ai envie d’emprunter une célèbre expression d’une rubrique de JJ pour dire Megd alors !! Je me suis jeté sur cet article quand j’ai vu le titre : "Hausse des prix: le gouvernement annonce des mesures énergiques" ....Et en fait de mesures, la primature demande aux ministres concernés, en substance, d’amener les commerçants à respecter les textes... et la primature appelle tout un chacun à faire preuve de civisme et de responsabilité. Je voudrais dire aux messieurs du gouvernement, c’est maintenant que nous avons besoin de savoir qu’il y a une autorité dans ce pays ! Concertations, discussions et autres fora, c’est ça votre problème !!! Trop de paroles, et trop peu d’actions !!! Si vous reconnaissez que les cours internationaux n’ont pas progressé et que le dédouanement n’a pas changé, ça vous fait quoi de prendre des mesures ici et maintenant.  Pendant que le PM rassemble ses ministres, qui vont appeler leurs SG, qui vont réunir les conseillers techniques, qui vont alerter tous les directeurs et que les comités ad hoc et autres s’activent, il y a des gens qui meurent de faim à Sanyiri, au secteur 30 et à Kalsaka. Mais ça, vous vous en foutez, j’imagine». Le râleur du Web a d’ailleurs dû certainement faire l’économie des perdiems qui sont engrangés pendant ces différentes rencontres. Et c’est la même humeur chez cet autre internaute, qui doit aussi ressentir l’augmentation du prix du sac de sel de cuisine, qui est passé de 5 500 F à 10 500 F : «Arrêtez de vous moquer de nous, chers dirigeants. On n’a pas besoin de papier longueur pour arrêter ce qui est anormal dans un Etat de droit. Les contrôleurs de prix sont là. Mettez-les à l’œuvre et foutez-nous la paix. Vous êtes responsables de ces flambées».

Ce ne sont donc pas seulement nous autres, les scribouillards, qui avons été piqués au vif par ce fameux conseil de cabinet qui doit avoir été convoqué juste pour montrer qu’on ne dort pas mais dont le compte-rendu sonne comme un aveu d’impuissance devant la vague déferlante de l’ouragan « Flambée ». Après des mois et des mois de calvaire pour les consommateurs burkinabè, voici ce que nous ont finalement servi Jean Baptiste Compaoré (Economie et Finances), Mamadou Sanou (Commerce), Filippe Sawadogo (porte-parole du gouvernement) et Tertius Zongo (Premier ministre) : une déclaration lapidaire dont le manque de précision et de fermeté le disputent à la préciosité du discours, un style prisé comme chacun le sait par le porte-parole du gouvernement. Le temps était pourtant aux mesures urgentes. A l’heure actuelle, il est ridicule de penser qu’une baisse substantielle de frais perçus pour des prestations de service d’un laboratoire national de santé publique ou d’une inspection générale des affaires économiques puisse provoquer une baisse des prix ou leur stabilisation. Ridicule également d’espérer que des concertations avec tous les acteurs impliqués dans la chaîne de commercialisation desdits produits accoucheront comme par enchantement d’un respect par tous des lois et règlements du commerce. Enfin, ridicule d’en appeler au civisme et au sens de responsabilité des uns et des autres pour « qu’ensemble nos actions s’inscrivent dans l’intérêt supérieur de la Nation » quand nous avons tous besoin de mesures énergiques.

Et à notre avis, les solutions ne manquent pas. Au lieu d’être répressives, elles peuvent même être juridiques comme la prise d’un décret par exemple. Souvenir, souvenir : suite à la Loi sur la concurrence et la liberté des prix votée en 1994, un décret avait été adopté en 2003 sur des produits «soumis à contrôle». Pour ces produits, l’Etat s’arroge le droit d’intervenir sur la fixation de leurs prix. Au nombre de cinq, il y a les hydrocarbures, les médicaments essentiels génériques, les articles scolaires, la vente de l’eau, la vente et la distribution du courant électrique. Ne peut-on donc  pas, par un autre décret, étendre cette disposition à d’autres produits de première nécessité dont les coûts ont été excessivement majorés ? En attendant, pour la population, c’est la déception qui prévaut à la lecture du communiqué. Elle qui attendait plutôt de nos gouvernants un paquet de décisions pratiques et applicables tout de suite. Cela paraît d’autant plus réalisable que les ministres interpellés par le chef du gouvernement estiment détenir les conclusions d’une «étude réalisée sur le niveau des prix et les variables explicatives». Le mal s’est enraciné. Ce n’est plus par des incantations, des vœux pieux ou par le nombre d’apparition à la télévision que l’on résorbera cette inflation galopante qui lamine d’autant plus le pouvoir d’achat des citoyens que leurs revenus ne suivent pas la même progression. Qu’attendent nos dirigeants pour réagir vraiment ? Les autorités nous ont servi, une fois encore, une décision dont la fermeté ne se trouve que dans son libellé. Pourtant, elles peuvent bien méditer cette phrase qu’aimait à lâcher à ses étudiants en Economie, le prix Nobel de la Paix, le Bangladais Mohammad Yunus, père du micro crédit et fondateur du concept de la Banque du pauvre : «Il y a toujours une solution élégante pour chaque problème». Encore faut-il qu’au Burkina, il y ait encore des gens qui compatissent sincèrement à la douleur de leurs concitoyens et qui veuillent bien, dans la célérité, travailler à trouver des solutions à leurs problèmes. En attendant, Tertius, Filippe et les autres, pour qui « même à 10 000 francs CFA on peut manger dans un hôtel huppé de la place », devraient savoir que les belles phrases ampoulées ne font pas bouillir une marmite, pas plus donc qu’elles ne remplissent le ventre. La situation s’y prêtant et pour s’exprimer comme les petits commerçants qui disent « c’est bon mais ce n’est pas arrivé » pour rejeter une proposition de prix tout en reconnaissant du même coup l’effort fait par l’acheteur, nous pouvons, en ce qui concerne cette sortie du gouvernement, conclure que « ce n’est pas bon et ce n’est pas arrivé ».

 

La rédaction

L’Observateur Paalga du 11 février 2008



11/02/2008
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