Série d’assassinats au Liban : Et si ce n’était pas la Syrie !
Série d’assassinats au Liban
Et si ce n’était pas la Syrie !
La comptabilité macabre se poursuit au Liban avec cet attentat mercredi dernier qui a coûté la vie au député phalangiste chrétien Antoine Ghanem. Il est mort avec six autres personnes, qui entrent dans la rubrique pertes et profits du fait de la carrure du principal disparu. Depuis deux ans et demi, la capitale libanaise est le théâtre de plusieurs attentats à la bombe visant notamment des personnalités antisyriennes, dont sept ont été tuées. Si ces différents crimes constituaient des sacrifices expiatoires qui permettaient de trouver une solution à l’imbroglio sociopolitique dans lequel vit cet Etat depuis belle lurette, cela passerait encore. Mais loin de là. Chaque année qui passe voit le pays du Cèdre dériver. De Charybde à Scylla en somme. Les crises se succèdent aux crises, les guerres aux guerres, les attentats aux attentats. Et pour mieux compliquer les choses, les causes de ces attentats sont des plus complexes : civiles, ethniques, politiques et religieuses sans compter les coups de boutoir fréquents du puissant voisin (Israël).
Le Liban a une histoire d’une violence susceptible de figurer dans le Guinness des Records. A l’accession du pays à l’indépendance en 1943, le chrétien maronite Béchara El Khouri, qui est libéré de la prison, est élu président de la République. En août, il parvient à un accord sur la base duquel un pacte national est signé en 1947 et qui définit le partage de pouvoir entre les différentes communautés : Les chrétiens maronites obtiennent la présidence de la République tandis que les musulmans sunnites reçoivent la tête du gouvernement, et les chiites, la direction de l’Assemblée. Cette répartition communautaire est destinée à enrayer les risques de guerre civile et s’accompagne de l’abandon des ambitions panarabes du côté musulman. Quant aux chrétiens, ils doivent renoncer à la protection occidentale. Dans les relations extérieures, Arabes et Occidentaux seront ménagés. Malheureusement, la rigueur et les concessions de ce pacte n’empêcheront pas la guerre civile d’éclater vingt ans plus tard.
A parti de ce moment, c’est la descente aux enfers : 1975, la guerre civile éclate au Liban ; 1978, occupation du Sud-Liban par Israël ; 1982, fondation du Hezbollah, le « parti de Dieu », assassinat de Béchir Gemayel et…massacres de Sabra et Chatila ; 1983, attentats à Beyrouth ; 1986, prise d’otages ; 1996, Israël lance l’opération Raisins de la colère et bombarde le camp de réfugiés de Cana ; et à partir de 2005, c’est la longue saison des assassinats, qui commence avec celui de Rafiq Hariri. Aujourd’hui, on est tenté de penser que cette odyssée sanglante n’est pas près de se terminer avec le dernier assassinat en date, celui d’Antoine Ghanem. On croyait pourtant qu’avec la victoire de l’armée sur les intégristes qui étaient retranchés dans le camp de Nahr Al Bared, la paix des braves avait sonné.
Et comme il fallait s’y attendre, la Syrie a aussitôt été indexée comme en étant le bras meurtrier. D’ailleurs, chaque fois que pareille situation arrive, le coupable idéal, le bouc émissaire est vite trouvé : il s’agit de ce pays, qui n’a pas bonne presse. Certes, cet assassinat peut être du cru d’un pays qui n’a jamais digéré son départ du Liban, mais aucune autre piste n’est à négliger. En effet, le pays traverse depuis six mois une crise politique, qui met aux prises la majorité du premier ministre, Fouad Siniora, et de Saad Hariri, appuyée par les Etats-Unis, donc Israël, à une puissante opposition soutenue par Damas et Téhéran. Et l’attentat, rapidement condamné par la Maison-Blanche, qui a attiré une nouvelle fois les regards sur la Syrie, intervient à six jours d’une réunion du Parlement libanais pour tenter de désigner un successeur au président Emile Lahoud, justement prosyrien. Pour dire qu’avec ces combats d’intérêts qui se mènent souvent par Etats interposés, aucune piste n’est à exclure. Car tous les coups semblent permis pour marquer des points. Cela pourrait diaboliser l’adversaire et/ou, pourquoi pas, créer une psychose qui entraînerait le pays dans une énième guerre civile. Le principal accusé peut bien en être l’auteur …tout comme les accusateurs.
Issa K. Barry
L’Observateur Paalga du 21 septembre 2007
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