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Sierra Leone : Pitié, ne réveillez pas les vieux démons !

Sierra Leone

Pitié, ne réveillez pas les vieux démons !

 

Que va nous réserver encore le pays du président Ahmad Tejan Kabbah, qui a dû monter au créneau, le mardi 28 août dernier, pour ramener le calme en Sierra Leone, en brandissant la menace de décréter l’état d’urgence en cas de poursuite des affrontements entre partisans des candidats au second tour de la présidentielle du 8 septembre ?

En effet, six personnes ont été blessées à Waterloo (5O km au sud de Freetown, la capitale sierra-léonaise), deux, dans la capitale et sept, à Koidu (une des principales villes du pays située à l’Est) dans des violences entre militants des candidats Ernest Koroma de l’opposition et Solomon Berewa du parti au pouvoir, après seulement quatre jours de campagne pour le second tour du scrutin.

Après un premier tour de la présidentielle, couplé aux législatives, le 11 août 2007, qui s’est bien déroulé ainsi que l’acceptation des résultats par les états-majors des partis en lice, rien ne laissait présager un scénario marqué par des violences, surtout que ce pays dont le sous-sol vachement riche revient de loin, comme nous le relevions dans notre édition n°6950 du vendredi 17 au 19 août 2007, en laissant les machettes pour les urnes.

C’était un signal fort des Sierra-Léonais en direction de la Communauté internationale, lesquels devaient, pour la première fois depuis la fin de la guerre civile, assurer seuls la surveillance de la consultation, les dernières en 2002 ayant été supervisées par les Casques bleus de l’ONU qui ont quitté le pays, il y a seulement deux ans de cela.

Ce test de haute importance, tel est le défi du président Ahmad Tejan Kabbah, qui n’a hésité un seul instant à opter pour la fermeté afin que sa patrie ne soit plus en proie aux vieux démons friands des « manches courtes et longues » du temps de la guerre civile (de mars 1991 au 18 janvier 2002), qui a causé la mort de 100 000 à 200 000 personnes et le déplacement de plus de 2 millions d’autres. Ce conflit, disons-le, a été une révélation de l’atrocité humaine à travers les célèbres mutilations de membres appelées « manches courtes et manches longues » où il était demandé à la victime de choisir entre une amputation à l’aide de machette de la main et la section du bras.

Des images insoutenables qui ont été, à l’époque, fortement condamnées et qui ont beaucoup terni l’image du pays, partant de toute l’Afrique. A ce propos, des réalisateurs africains à l’instar du Nigérian Newton A. Aduaka, Etalon d’or au dernier Fespaco (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou) avec son film « Ezra », n’ont pas manqué, entre autres, de dénoncer l’emploi massif des enfants soldats transformés en machines à tuer et leur instrumentalisation pour parvenir à contrôler les zones diamantifères. _La Be Beers sud-africaine y garde un rôle très controversé, puisqu’elle fut la première acheteuse de ces diamants, vendus au Liberia voisin, clandestinement.  Des diamants sierra-léonais qui ont même amené, à un moment donné, les enquêteurs de l’ONU à s’intéresser à Ouagadougou.

Avec un passé aussi horrifiant et une Sierra Leone économiquement à genoux au sortir de la guerre (176e sur 177 au classement du développement humain), on peut bien comprendre la réaction du président sierra-léonais qui veut éviter à son pays une nouvelle hécatombe. Déjà qu’il a donné le bon exemple en ne tordant pas le cou à la Constitution pour régner à vie comme il est de coutume dans bon nombre de pays dont le nôtre, Koroma du Congrès de tout le peuple (APC) et le vice-président sortant, Berewa, du Parti du peuple de Sierra Leone (SLPP) doivent s’inspirer de la sagesse et de la grandeur de cet homme pour préserver leurs concitoyens d’autres malheurs.

Ces deux candidats ont, certes, promis récemment à une mission de la CEDEAO, dont a fait partie le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Djibril Bassolé, de fumer le calumet de l’apaisement en appelant lors d’une tournée sur le territoire national leurs électorats respectifs à enterrer la hache de guerre, mais la prudence doit être de mise, car la moindre étincelle peut provoquer des dégâts aux effets dévastateurs, surtout que rien ne prouve que chaque Sierra-Léonais ne dispose toujours pas de poudrière en état de veille. 

Il appartient donc à tous les acteurs du microcosme politique d’accompagner les efforts de pacification, car le pays n’a plus besoin de pyromanes.

Cyr Payim Ouédraogo

L’Observateur Paalga du 4 septembre 2007



04/09/2007
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