Sociétés de gardiennage, brigades de sécurité : Une exploitation sans scrupule
Sociétés de gardiennage, brigades de sécurité
Une exploitation sans scrupule
Les vigiles vivent une injustice et une exploitation indignes d'un Etat de droit. C'est à une véritable exploitation de l'homme que se livrent certains employeurs. Le droit des employés est bafoué. Ils sont sans statut, sans bulletin de paie et sans contrat de travail. Le code du travail est relégué aux oubliettes. Les injures, les accidents, les licenciements, les retenues, les arriérés de salaire sont leur quotidien.
Pierre travaille depuis deux ans dans une société de la place. Mais déjà, il a perdu toute envie de faire carrière dans son métier. "C'est de l'esclavage ", affirme-t-il. Depuis les deux ans, il est toujours à la charge de ses parents. Le salaire qu'il gagne ne lui permet pas de se prendre en charge. Il est arrivé dans ce métier après vaine tentative de décrocher un emploi avec son niveau de terminale D. Comme pierre, beaucoup d'autres aimeraient un jour se débarrasser de la tenue. Dans la quasi-totalité des sociétés, la situation est presque la même. Ces jeunes en veulent beaucoup à leurs supérieurs. "Pendant qu'ils dorment tranquilles, nous, on n'a même pas où dormir", s'indigne un vigile d'une quarantaine d'années dont le physique donne cinquante ans. "Je suis jeune, c'est la pauvreté qui m'a vieilli", affirme-t-il. Celui-ci a un carnet où il note les problèmes que rencontrent les vigiles. Si ce n'est pas lui-même qui les a vécus, ce sont ses camarades. Avec ses dix ans dans ce travail, il sait de quoi il parle. Lorsqu'il a une ordonnance ou un problème sérieux, il est obligé de solliciter l'aide de quelqu'un d'autre. Les vigiles sont obligés de présenter un carnet de santé aux patrons en cas de maladie sous peine de réduction de salaire. Ce qui constitue un casse tête pour des gens qui se soignent à l'indigénat ou avec des médicaments de la rue. Un ex-vigile affirme avoir perdu son poste parce qu'il est allé assister son enfant hospitalisé. Son employeur lui a refusé une autorisation d'absence. Un droit pourtant reconnu par le code du travail du Burkina. L'article 153 de ce code stipule que le travailleur salarié, qui le désire, peut obtenir de son employeur un congé sans solde pour une durée de six mois renouvelable pour l'entretien de son enfant. En déposant une demande un mois avant. En cas de maladie grave, cette disposition ne s'applique pas.
Par solidarité, les vigiles se donnent la main pour permettre aux uns de s'absenter en cas de problème. Certains patrons refusent cette organisation. Ceux qui se font prendre sont virés sans préavis. Toute relation avec les travailleurs des services dont ils assurent la garde est interdite. Pourtant, beaucoup nourrissent l'espoir de décrocher un emploi décent par leurs relations. Ils estiment que le métier de vigile n'est pas une panacée au chômage, mais une occupation temporaire. C'est ce que les patrons craignent, affirme un agent.
L'organisation du travail diffère d'une société à l'autre. Certains assurent la garde tous les jours sans repos. D'autres en revanche se relèvent. Ce qui leur permet de faire d'autres petits boulots. Les heures supplémentaires sont payées dans certaines sociétés. Ce qui est le plus frustrant, à leurs yeux, c'est le manque de considération à leur endroit. Le patron est un demi dieu. Seul le travail des employés l'intéresse. Les insultes, les injures et les menaces sont les déboires quotidiens de ces hommes. " Notre patron passe ici sans nous dire bonjour. On peut quitter sans rencontrer une fois le patron. Le seul contact, c'est avec les contrôleurs. ", affirme Salif qui vient d'être remercié de son travail. Les employeurs ne sont pas les seuls qui rendent la vie dure à ces gens. Des vigiles sont souvent les garçons de course des travailleurs. S'ils n'y trouvent pas d'inconvénients, il y en a qui abusent.
Dans les domiciles, certains sont devenus des boys sans la moindre considération ni une contrepartie. Si certains ont le courage de réagir, d'autres par contre ont peur de perdre leur emploi. Le patron prend toujours faits et causes pour son client pour ne pas perdre le marché.
Les congés sont refusés à ces travailleurs. Une entorse flagrante aux textes en vigueur. Le droit de jouissance du congé est acquis après une durée de service effectif (article158 du code du travail). La liberté syndicale qui est un droit reconnu par
Tous les déboires des vigiles ont pour cause principale le salaire. Dans la plupart des sociétés, le salaire est compris entre 18000 et
Un patron de société est catégorique sur ce sujet et se justifie. " Si on est d'accord que tout travail mérite salaire, de la même manière, tout salaire mérite travail. Quand des vigiles s'enferment dans les service ou les véhicules pour dormir, ils ne doivent pas s'attendre à un salaire. En cas de problème, c'est la société qui paie. La coupure des salaires se justifie même si c'est une violation des textes. La mesure n'est pas légale, mais elle est légitime ".
Le salaire même insignifiant ne tombe pas toutes les fins du mois. Des sociétés cumulent des mois d'arriéré de salaire. D'autres excellent dans le paiement tardif des agents. Jusqu'au 15 du mois, certains agents ne sont pas encore payés.
Un métier à risque 100 et aux avantages zéro
Les vigiles pensent qu'ils méritent un traitement décent au regard des risques de leur métier. Certains de leurs camarades ont été tués dans l'exercice de leur fonction, d'autres ont eu des accidents graves. Ilboudo Marc garde un mauvais souvenir de ce travail. Il a perdu une partie de son nez dans une altercation en voulant rétablir l'ordre. Il a reçu en retour de ses supérieurs une mutation, des avertissements, et une obligation de prendre en charge les frais médicaux. Pour lui, c'est une leçon. Désormais, il ne prendra plus de risque. " S'il y a un danger, je me cherche ", lance-t-il dans une colère comme s'il en voulait à tout le monde. En réalité pour eux, ils ne sont que des agents de dissuasion.
Ils n'ont pas reçu une formation adéquate pour se protéger et accomplir correctement leur mission. Quelques uns portent des armes. Parmi eux, beaucoup ne sont pas formés pour le port et l'utilisation d'arme à feu. La formation n'est pas uniforme pour toutes les sociétés. Elle dure au maximum une semaine et consiste à apprendre les missions et le code de conduite. Pour être vigile, le postulant doit simplement fournir une demande, un acte de naissance, un diplôme pour ceux qui le possèdent. Ainsi, on y rencontre des agents sans diplôme, des brevetés, des bacheliers et même des étudiants.
L’Evénement on line du 20 Novembre 2007
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