Après le conflit ouvert, les exactions à huis clos au Tchad
Etat d’urgence au Tchad
Après le conflit ouvert, les exactions à huis clos
Trois fois ! Cela fait le troisième état d’urgence qu’Idriss Deby Itno, le chef de l’Etat tchadien, décrète en 18 ans de pouvoir (il est arrivé au pouvoir en janvier 1990). Autant dire qu’il commence à devenir coutumier de cette situation exceptionnelle, qu’il annonce pour régenter le Tchad ou plutôt pour régler ses comptes avec ses ennemis intérieurs ou supposés tels.
En effet, le maître de Ndjamena a décidé le 15 février dernier d'instaurer l’état d’urgence pour 15 jours reconductible, consécutivement aux combats qui l’ont opposé aux troupes de Mahamat Nouri, de Timane Erdimi et d'Abdelwahib Aboud Makckaye. Des combats d’où il est sorti vainqueur grâce à
Cet état d’urgence, outre le couvre-feu qu’il instaure de 0 heure à 6 heures du matin, impose que «les gouverneurs des régions doivent mobiliser tous les moyens humains et matériels disponibles en vue de ramener l’ordre public». Autrement dit derrière ce langage policé il faut y lire la volonté farouche d’un pouvoir décidé à en finir avec tous ceux qui ne sont pas du même avis que lui.
Certes ceux qui, régulièrement, tentent de s’emparer du pouvoir de Deby par les armes et qui ont pilonné le palais présidentiel ce début février 2008 ne sont pas des enfants de chœur, mais à vrai dire, en décidant cet état d’urgence on a la vague impression que l’encore président tchadien se donne les moyens de finir le sale boulot, ce qui signifie que c’est la porte ouverte à toutes les dérives totalitaires.
On pense d’abord à la presse en pareille cas, dont les animateurs ont le choix entre prendre leur baluchon pour essayer de franchir la frontière et se taire ou encore tenter de rendre compte des événements en se préparant à subir les foudres du pouvoir en place. Et Dieu seul sait que les colères de l’ex-com’chef de Hissène Habré sont mortelles.
Surtout, on se fait du souci pour les opposants politiques, notamment les Wadal Kamougué, Ibni Mahamat Saleh et Ngarlejy Yorongar, portés disparus depuis plus de deux semaines après un rapt à leur domicile. Un quatrième opposant, Lol Mahamat Choua, ayant été retrouvé vivant. On est d’autant plus angoissé qu'à situation particulière mesures particulières : Deby Itno a-t-il profité de cet état d’urgence pour liquider ses opposants politiques ?
De sinistres précédants font craindre le pire pour ces opposants, non armés, avec les exemples des Laokein Bardé et de Bichara Digui, qui furent tués dans des circonstances similaires, mi-trouble mi-calme dans les années 90.
Ne légitime-t-il pas alors a posteriori l’action des rebelles armés qui veulent sa tête ? Des rebelles qui estiment que le chef de l’Etat est rétif à tout dialogue politique et proclament à cor et à cri que «la politique délibérée du président Deby consiste en l’utilisation systématique et ouverte de la liquidation physique comme moyen de résolution des contradictions politiques».
Croisons les doigts pour que ces kidnappés de février 2008 aient plus de chance.
Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
L’Observateur Paalga du 18 février 2008
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