L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Détournement et corruption en Afrique : Le sursaut du Cameroun

Détournement et corruption en Afrique

Le sursaut du Cameroun

Implacable fut le verdict de 20 ans d'emprisonnement ferme prononcé par le tribunal à l'encontre de Ondo Ndong, ancien directeur général du Fonds d'équipement intercommunal (FEICOM) et ses complices, pour avoir détourné 13 milliards F CFA. Le procureur avait requis, particulièrement contre l'ex-DG, une peine de 75 ans de prison. Les 14 condamnés devront en outre verser solidairement 14 milliards F CFA de dommages et intérêts au FEICOM. Cette décision de justice aurait été prononcée dans un pays occidental que cela n'aurait étonné personne. Elle aurait été prise dans un autre pays africain qu'elle aurait peu ému. Mais, prononcée par la Justice camerounaise, c'est tout un symbole et, peut-être, la volonté affichée par le pouvoir de Paul Biya de réussir l'opération mains-propres" qu'il a initiée il y a deux ans. Considéré avec le Nigeria comme le pays le plus corrompu en Afrique et tenant, de ce fait, l'une des palmes peu enviables de champion du monde en matière de corruption, le Cameroun commence à faire la preuve que le combat peut être engagé et gagné contre ces jumeaux hideux que sont les détournements de deniers publics et la corruption. Le mérite de la Justice camerounaise est d'autant plus grand que le DG destitué et poursuivi a le bon parapluie politique. En effet, il fait partie du sérail politique et, ne serait-ce que pour cela, n'aurait jamais dû être inquiété. Mieux, être riche de quelque 13 milliards F CFA, même si c'est un pactole mal acquis, confère forcément un statut d'intouchable. Pourtant, c'est bel et bien arrivé au Cameroun où les dirigeants, que ce soit sous la pression des bailleurs de fonds ou non, ont tapé du poing sur la table. Sous d'autres cieux, malgré l'épée de Damoclès que représentent les partenaires au développement, des actes de ce genre sont impunis. Il semble, du reste, que nombre de bailleurs de fonds sont loin d'être blancs comme neige dans la plupart de ces affaires rocambolesques de gros détournements de l'aide au développement. La corruption, cette hydre froide et malheureusement invincible jusqu'à présent, n'épargne aucun milieu. Qui pis est, avec le détournement des deniers publics, elle se nourrit de la complicité dangereuse de personnalités qui devraient être au-dessus de tout soupçon. De ce fait, la société est dépouillée de plus en plus de tout ce qui devait lui servir de bouclier contre les bourrasques destructrices de toutes les vertus morales. Point n'est besoin de passer par des démonstrations alambiquées ou savantes pour mettre en épingle les effets nocifs du couple détournements - corruption sur l'économie des pays en développement. Paradoxalement, ce sont nos pays pauvres qui se permettent complaisamment ces dérives. C'est notamment en Afrique, un continent subissant déjà les affres d'une pauvreté endémique, que les comportements les plus amoraux règnent en maîtres. A contrario, les pays dits développés qui pourraient se permettre quelques écarts sans trop compromettre leurs équilibres financiers, se contraignent dans des régimes de rigueur et d'austérité qui feraient pâlir de jalousie Picsou, ce personnage de bande dessinée riche comme Crésus mais capable de jeûner à mort pour ne pas dépenser un franc de son immense fortune. Pourquoi les Africains, si habiles dans le mimétisme, voire l'assimilation, ne réussissent-ils pas à copier chez les Occidentaux le respect du bien public ? En attendant qu'on trouve une réponse à cette interrogation, la corruption continue de faire des ravages dans les pays africains, déstabilisant l'économie nationale et empêchant tout décollage vers le développement. Dans ce contexte, le sursaut camerounais est à saluer. Il le serait davantage si les dirigeants maintenaient le cap dans la lutte contre les détournements et la corruption, car cela ne servirait à rien de s'arrêter en si bon chemin. C'est bien d'exhiber le trophée Ondo Ndong, mais ce serait encore plus heureux de décapiter tout le système qui a été mis en place et qui est minutieusement entretenu par les fossoyeurs des économies africaines. Traquer avec la dernière rigueur les auteurs de détournements de deniers publics et de corruption, c'est d'ailleurs une croisade noble contre ces criminels qui, ailleurs, sont des gibiers de potence. Il serait fastidieux de relever ici les investissements qui pourraient être réalisés dans les domaines prioritaires de l'éducation et de la santé, avec ces milliards de francs qui sont détournés régulièrement et impunément dans les pays africains. Pourvu que le sursaut camerounais dure dans le temps et, surtout, qu'il fasse des émules au niveau des autres pays. Cela y va du développement de l'Afrique.

 

Le Pays  du 4 juillet 2007



04/07/2007
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