Gbagbo veut supprimer ce qu'ADO avait institué
Carte de séjour en Côte d'Ivoire
Gbagbo veut supprimer ce qu'ADO avait institué
En 1989, la Côte d'Ivoire connaissait une crise économique. Pour faire face à la situation, le président Félix Houphouët-Boigny a alors fait appel à un économiste qui a occupé des fonctions au Fonds monétaire international (FMI) et à la BCEAO, en l'occurrence le "Voltaïque" Alassane Dramane Ouattara, surnommé ADO, nommé Premier ministre en 1990. Comme solution miracle au marasme économique que vivait le pays, l'enfant de Dimbokro, près de Yamoussokro, instaure une carte de séjour pour ceux qui n'ont pas la nationalité ivoirienne. C'est le début de tracasseries policières et de spoliations. Tous les étrangers sont tenus de posséder ce sésame sous peine d'être malmenés par les forces de sécurité. Elèves en vacances venant de pays voisins, fonctionnaires de passage, personne n'échappe à cette nouvelle mesure, supposée renflouer les caisses de l'Etat.
Les Burkinabè, qui se comptent en millions d'âmes en terre d'Eburnie, en sont les premières victimes. Malheur à eux s'ils tombent dans les filets de la police non munis de cette carte ou si elle n'est pas à jour. Ainsi, la stigmatisation et la xénophobie s'exacerbèrent au fil des ans au pays d'Houphouët-Boigny.
L'étranger, surtout le Mossi, sera voué aux gémonies. Et nos compatriotes vivront l'enfer sur terre lorsque surviendra la crise du 19 septembre 2002, vu que le Burkina Faso sera indexé comme étant le voisin qui a offert gîte et couvert aux rebelles, le mentor de cette bande de révoltés qui contrôle toute la partie nord de la Côte d'Ivoire.
Cinq ans après le déclenchement du conflit, la tempête semble avoir quelque peu baissé. Le dialogue direct entre les protagonistes de la crise sous l'égide du président du Faso, Blaise Compaoré, a abouti à ce qu'on appelle désormais l'Accord de Ouagadougou, lequel a été, on se rappelle, signé le 4 mars 2007 à Ouaga 2000.
Depuis, le processus de réconciliation est en marche entre frères ivoiriens. Du même coup, les relations entre le Burkina et la Côte d'Ivoire se normalisent. C'est dans ce contexte de dégel que le dimanche 28 octobre 2007, lors de la rencontre entre la communauté burkinabè de Côte d'Ivoire et le président de la République, Laurent Gbagbo, ce dernier a promis de supprimer la fameuse carte de séjour. "En 1990, dit-il, Alassane Ouattara, pour redresser l'économie, a instauré la carte de séjour. Le FPI a été le seul parti à dire non. Et tous les malheurs que nous avons prédits sont arrivés". Et il a ajouté comme pour dire qu'il a toujours porté ses frères voisins dans son cœur : "Quand je suis devenu président, j'ai divisé le prix de cette carte en deux. Mais je vois que non seulement elle n'apporte pas grand-chose dans la caisse de l'Etat, mais crée des problèmes inutiles... Elle est nocive et dangereuse". Vivement donc que ce document, qui n'a va à l'encontre de l'intégration et de la libre-circulation des personnes au sein de la CEDEAO et de l'UEMOA ne soit plus qu'un mauvais souvenir.
Si sa suppression devenait effective, ce serait une ironie de l'histoire, vu que c'est le "Burkinabè" ADO qui l'a instaurée et que ce serait Laurent Gbagbo, qualifié de xénophobe, qui aurait décidé de sa suppression.
Quand bien même la promesse présidentielle ne serait pas dénuée de tout calcul politique, elle demeure courageuse et à saluer. Si elle se réalisait, elle aurait le mérite de contribuer à souder davantage nos deux peuples, liés par l'histoire et la géographie.
Adama Ouédraogo Damiss
L’Observateur Paalga 30 octobre 2007
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