L'Heure du Temps (Blog d'Information sur le Burkina Faso)

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Obligation scolaire au Burkina : Utopie ou réalité ?

Obligation scolaire au Burkina

Utopie ou réalité ?

Utopie ou réalité ? C'est la question posée dans les lignes suivantes par une enseignante en ce qui concerne l'obligation scolaire au Burkina. Est-il vrai que les enfants ont des droits au Faso ? Médiatiquement parlant, oui ; mais dans la pratique… non. Le droit le plus strict de l’enfant est d’être "éduqué"! Que diantre !

Trop d’associations et d’organisations caritatives s’affairent avec ardeur autour de la notion d’enfance sans pour autant aider les enfants. L’Etat n’en fait pas plus, même avec sa nouvelle loi d’orientation de l’Education où le sempiternel principe d’obligation scolaire refait surface. Les adjectifs laudatifs en la matière pleuvent à longueur de journée alors que dans la pratique "niente" ne fait renverser la vapeur.

Les Burkinabè susurrent que la nouvelle loi d’orientation de l’Education présage un hiatus car les quidams veulent booster le nombre de leurs fans. La nouvelle loi ne peut pas devenir le bréviaire des Burkinabè parce que les précédentes préconisaient les mêmes issues, restées au stade théorique. Vétustes, elles l’ont toujours été. Cette loi est si frêle dans ses contours et contextes qu’elle risque d’exacerber le challenge. Cessons de nous embrouiller avec les termes "décret d’application". La légalité doit s’assumer d’elle-même. Elle est une notion qui ne s’apprécie pas par rapport au droit existant mais par rapport à l’idée, à l’aide, à la représentation qu’un peuple se fait du droit à un moment déterminé. La volonté, dans ses entreprises les plus décisives, se met en jeu elle-même. Dans un pays où l’intrépide consiste à braver ostensiblement les règles républicaines parce qu’on est de tel bord, le respect des lois et des règlements attendra d’abord. Je verse des larmes quand je constate que dans certaines localités de mon pays, l’existence des infrastructures et de l’administration scolaire n’est pas forcément source de bon taux de scolarisation. Respecte-t-on le droit de l’enfant quand il y a onze élèves en classe et cent vadrouillant dans le village ? Peut-on parler, dans ce cas, d’obligation scolaire ? Ou bien la République veut revenir à la famille qui élève mal ? Qu’est-ce donc que “ obligation scolaire” ?

Un caractère obligatoirement largement reconnu

La déclaration universelle des droits de l’Homme, proclamée par les Nations unies le 10 décembre 1948, en son article 26 (1), atteste que l’enseignement élémentaire est obligatoire. La Déclaration des droits de l’enfant, adoptée à l’unanimité par les pays membres de l’organisation des Nations unies (ONU) le 20 novembre 1959, stipule, dans son principal article, que "l’enfant a droit à une éducation qui doit être gratuite et obligatoire au moins aux niveaux élémentaires". La conférence internationale sur le travail des enfants tenue le 30 octobre 1997 à Oslo en Norvège a adopté de fournir une scolarisation élémentaire obligatoire, universelle et gratuite pour tous. Au niveau national, de la Constitution du 2 juin 1991 jusqu’aux lois et textes de l’éducation, tous prônent le caractère obligatoire de l’enseignement élémentaire. Et même qu’une nouvelle loi adoptée en juillet 2007 par l’Assemblée nationale vient de corroborer cette disposition d’obligation scolaire qui apparaît par récurrence. Il s’agit, pour cette dernière, d’opérationnaliser le principe de la gratuité et de l’obligation scolaire qui couvre la période d’âge de 6 à 16 ans.

Dans ce contexte, on ne peut comprendre que des parents refusent allègrement d’amener leurs enfants à l’école, alors que les infrastructures et les structures de qualité existent. Pas d’étonnement car au Burkina les lois sont toujours votées et elles tombent toujours en désuétude ou en catimini.

Est-il possible que les droits des enfants soient brimés avec désinvolture au su des forces de l’ordre, des préfets et autres démembrements de l’Etat, garants des valeurs républicaines ? N’a-t-on pas pitié de ces enfants qui n’ont ni la force ni la conscience de réclamer leur droit le plus absolu ? Sommes-nous dans la légalité si nous laissons faire ? Brimer un enfant dans ses droits d’éducation, c’est léser gravement l’adulte parce que c’est déposer en lui le sentiment d’injustice capable de donner une personnalité qui ne pourra pas vivre la morale et l’action civique. Et qu’est-ce que l’éducation si ce n’est créer chez les futurs citoyens des habitudes saines ? Les forces de sécurité qui assurent difficilement la sécurité pourraient sans doute faire des admonestations aux parents récalcitrants.

Obliger à l'obligation scolaire

Le plan décennal de développement de l’éducation de base tente d’atteindre un taux de scolarisation de 70% à l’orée de l’année 2010. Je dirai que si une seule personne levait le petit doigt impérieux pour obliger les parents inconscients à adhérer à la règle, le Burkina atteindrait un taux de scolarisation de 80%. Ce boom scolaire lui permettra d’avoir vingt points dans le classement de l’indice de développement durable du PNUD. Notre retard sur le plan mondial est surtout dû à l’obscurantisme, la sous-scolarisation et l’analphabétisme, et non à une fatalité. Voilà une aubaine pour donner un point de plus à la politique du Président Blaise Compaoré. Ou bien on réagit promptement ou bien le progrès … abdique ou dégénère, l’acuité du problème exige l’intervention diligente et, avec abnégation, de tous les pions du développement durable. Les membres des organisations et associations gravitant autour de l’enfant devraient nous convaincre de leur intégrité en obligeant à l’obligation scolaire. Leur baromètre de mansuétude devrait se prendre à partir de leur engagement à "l'obligation scolaire".

Certes, tout ne doit pas être que répression. Il est aussi vrai que chez nous au Burkina, l’essentiel est de voter les lois. Mais concernant les fonctions référentielle et conative des lois, tout est incurie et laxisme. Cet état de fait ne nous permet pas la fonction phatique entre l’appareil des pouvoirs et le peuple, que la loi soit diaphane et la sensibilisation à outrance. Après, la loi devrait être respectée ou, au contraire, le contrevenant s’exposera à des sanctions effectives. C’est cela, l’Etat de droit. La loi est intransigeante.

Les tentacules d’expansion de l’offre éducative n’ont pas encore atteint certaines localités. Là, il n’y a pas de problème d’obligation. Cette responsabilité incombe à l’opinion internationale qui n’ignore pas que la pauvreté est à la fois une cause et une conséquence de la dégradation de l’environnement. Les pays pauvres doivent bénéficier d’un flux important de volume d’aide publique au développement de l’Education.

La mobilisation internationale contre le travail des enfants tenue en Norvège ambitionnait dans son programme d’action de prévenir et d’éliminer toutes les formes de travail des enfants et, ensuite, elle allait assurer la scolarisation de tous ces enfants. C’est pourquoi des organisations et associations d'horizons divers et d’autres à fondements mercantiles ont fait de leur cheval de bataille l’abolition de toutes les formes de travail des enfants. Mais, si l’objectif est noble, car le travail des enfants comporte beaucoup d’inconvénients néfastes à la croissance économique et sociale de la planète, force est de reconnaître que la partie scolarisation de l’enfant n’est pas prise en compte. La famine dans les zones arides pousse les populations à laisser partir leur progéniture à l’exode rural pour survivre. Ces enfants, amputés de leur droit de survie par les nouvelles mesures de lutte contre le travail des enfants, devraient être en retour scolarisés où ils auront par jour un repas de la cantine scolaire. Par contre, dans la réalité il y a une antinomie dans la velléité stratégique de la mobilisation internationale qui se voudrait radicale afin d’abolir le travail des enfants, qualifié de « violation grave» des droits élémentaires de l’homme".

Tout compte fait, ceci n’est ni une diatribe encore moins un acte pour vilipender qui que ce soit. Seulement, la critique engendre la fertilité. On aurait dit que l’ignorance serait un crime. Savoir et ne rien dire serait un crime encore plus grave. Faire carrière pendant vingt ans dans un système et être incapable de s’immiscer dans les problèmes de ce système conduit à un déni préjudiciable de l’avenir de ce système. Telle est la magnanimité de cet acte.

Bon vent à la nouvelle réforme du système éducatif du Burkina Faso qui espère ceci : "Aucun Burkinabè n’exercera son métier sans avoir au préalable fréquenté le système éducatif."

Mama Koné

Le Pays du 17 janvier 2008



16/01/2008
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